Réalisé par John Badham - Sortie US le 3 juin 1983.
Scénario : Lawrence Lasker & Walter F. Parkes.
Musique : Arthur B. Rubinstein.
Directeur de la photographie : William A. Fraker.
Avec Matthew Broderick (David Lightman), Dabney Coleman (McKittrick), John Wood (Falken), Ally Sheedy (Jennifer), Barry Corbin (General Beringer), ...
Durée : 114 mn.
Adolescent passionné d'informatique, David trouve le mot de passe qui lui permet d'accéder à une nouvelle série de programmes censés être des jeux. Ce qu'il ignore, c'est qu'il s'est connecté au WOPR, un super ordinateur simulant des stratégies militaires et contrôlant la puissance de frappe nucléaire de tous les États-Unis. Et lorsque David propose une partie de "Guerre Thermonucléaire Globale" au WOPR, ce dernier entend bien la mener jusqu'au bout ...
A l'image de TRON sorti l'année précédente, WARGAMES posa un regard sérieux et visionnaire (mais aussi inquiet) sur la montée en puissance de l'informatique dans notre vie quotidienne, que ce soit dans nos foyers où dans la gestion des administrations et de l'armée.Sous la caméra du solide artisan John Badham (LA FIEVRE DU SAMEDI SOIR et une étonnante version de DRACULA avec Frank Langella), la fin du monde par le feu nucléaire prend la forme d'un gigantesque jeu vidéo disputé par deux enfants brillants (David et le super ordinateur WOPR) mais aussi terriblement immature. Sans jamais avoir recours à une diabolisation simplette des nouvelles technologies, WARGAMES est un thriller haletant doublé d'un drame sur le passage à l'âge adulte et des désillusions qui l'accompagnent.
Pour David Lightman (excellent Matthew Broderick), hacker et no-life avant l'heure, sa mésaventure va l'amener à réaliser que son écran d'ordinateur et son génie ne peuvent pas le protéger du monde extérieur et de ses réalités. Si c'est son talent dans l'informatique qui le rend si spécial et brillant, c'est aussi sa plus grande faiblesse. Naïf, il est tout d'abord incapable de faire la différence entre l'illusion et la réalité, entre un jeu et une apocalypse programmée. C'est autre écran (de télévision cette fois-ci) qui va l'amener à réaliser sa terrible erreur, un reportage lui apprenant que ses "exploits" sur ordinateur ont bien des conséquences réelles. Obligé de quitter enfin le nid familial pour réparer ses erreurs, David va changer et sa vision du monde avec lui. Apeuré, rongé par la culpabilité, il va ensuite passer à l'action, se lançant en quête d'un mentor (le professeur Falken, ermite fataliste) et mettant son talent à profit, non plus pour jouer mais pour éduquer. A travers cet arc dramatique, John Badham met en garde contre les notions de jeu pour le jeu et de progrès pour le progrès, l'informatique sans valeurs pédagogiques, éducatives, ne pouvant alors évoluer que vers de très dangereuses chimères.
La même idée est appliquée au WOPR, non pas simple élément technologique mais personnage à part entière. Comme le HAL-9000 de 2001, L'ODYSSÉE DE L'ESPACE, le WOPR est une intelligence artificielle dotée d'une personnalité qui va prendre le pas sur sa programmation. Parce que le WOPR est avant tout Joshua, un enfant passionné par le jeu, fermement résolu à ne pas abandonner une partie et obsédé par les notions manichéennes de défaite et de victoire. C'est aussi un enfant abandonné par son père (le professeur Falken, encore lui) et à qui on a confié les clés de la destruction de toute vie sur Terre, ne lui laissant pour seuls gardiens que des scientifiques et des militaires incapables de s'entendre entre eux. Son adversaire, David, va devenir son éducateur. A travers la métaphore du jeu de morpion, il va assimiler l'une des plus horribles vérités : en cas de guerre, il n'y a JAMAIS de vainqueurs. Moralité, l'informatique ne peut pas se limiter à une série de O et 1 et doit évoluer vers une conscience plus adulte. Tant que ce ne sera pas le cas, il apparaît suicidaire de lui laisser le contrôle sur nos vies.
Série B spectaculaire plus intelligente qu'elle n'en a l'air, WARGAMES est une réussite totale. Rendant modestement hommage au Kubrick de DR. FOLAMOUR et 2001, John Badham fait preuve d'une maîtrise technique à toute épreuve et soigne sa direction d'acteur. Appuyé par le score mémorable de Arthur B. Rubinstein (entre nappes synthétiques et rollercoaster symphonique) et un montage au cordeau, il parvient même à faire exister une romance très crédible et touchante (parce que jamais surjouée) entre Matthew Broderick er la craquante Ally Sheedy. Dans ce projet qui n'était pas le sien (il a remplacé Philip Kaufman au pied levé), John Badham y a également trouvé matière à inaugurer une trilogie de techno-blockbusters (si quelqu'un a un terme plus adéquat je suis preneur) qu'il poursuivra avec le policier TONNERRE DE FEU et conclura avec la comédie SHORT CIRCUIT.
Très bonne réflexion, je cherchais un résumé analytique de qualité et le tien est parfait. Tu retranscrit avec habileté tes/mes pensées en mots et en phrases bien construites, et avec des références en bonus, merci !
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