Je n'ai toujours pas repris la route. Je n'ai rien fait cramer. J'ai juste l'impression que la chambre que j'occupe dans ce village est sur le point de se transformer en cercueil. Je suis paumé en plein milieu de nulle-part dans un pays qui n'existe plus. Couché, incapable du moindre mouvement sans avoir envie de crever dans l'instant, j'en viens à me demander si j'existe encore.
Je suis victime d'insolation. Pas besoin d'être médecin pour le comprendre. Je me suis infligé ça tout seul, sans vraiment y réfléchir. Mes maux de têtes sont insupportables. Comme si chacune de mes putains de terminaisons nerveuses étaient torturé, brûlé au fer rouge par un inquisiteur un peu trop zélé. A se taper la tête contre les murs.
La fièvre, elle, me pousse au délire. Carole et le capitaine Thibault sont revenus me rendre visite. Je croyais les avoir laissé au camp, mais ils m'ont retrouvé. Ils ont arrêté de se décomposer. A dire vrai, ils sont redevenus comme ils étaient avant de mourir. Mais ils préfèrent rester à bonne distance de ma carcasse malade, comme si j'avais la lèpre. Ils ne me parlent plus, ne me sourient plus. Ils sont comme deux statues, plantées dans un coin de la pièce. Ils me méprisent, je crois. Lorsqu'un zombie est entré dans la pièce, une horreur à moitié brûlée, le bras gauche coupé, ils n'ont même pas bougé. J'avais gardé la machette, par précaution. Je n'ai même pas eu à me lever pour le buter celui-là. J'ai visé. J'ai tendu le bras et j'ai attendu qu'il vienne s'empaler sur ma lame. Je suis resté là une bonne quinzaine de minutes avec ce foutu zombie au bout de ma machette, le lit se couvrant peu à peu de son sang noir. Je suis resté là comme un abruti, le regard planté dans le vide.
J'ai cligné des yeux.
Un zombie.
J'ai cligné des yeux.
Plus de zombie.
Un rêve éveillé. Un rêve à la con.
L'atmosphère de la pièce est pire que celle d'un sauna. La poussière forme un épais nuage qui semble s'épaissir de minutes en minutes. Je n'y vois plus grand chose. Si un zombie entre vraiment dans la pièce, je n'arriverais sans doute pas à le remarquer avant qu'il ne se mette à me boulotter.
J'ai besoin de dormir. J'ai besoin de manger.
Si je me réveille en déambulant dans la pièce, incapable d'articuler le moindre son cohérent et avec une énorme fringale de tartare humain, je n'aurais plus de questions à me poser.
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