Réalisé par John Hughes - Sortie US le 15 février 1985.
Scénario : John Hughes.
Musique : Keith Forsey, Simple Minds (chanson "Don't you (forget about me)").
Directeur de la photographie : Thomas Del Ruth.
Avec Judd Nelson (John Bender), Molly Ringwald (Claire Standish), Emilio Estevez (Andrew Clark), Ally Sheedy (Allison Reynolds), Anthony Michael Hall (Brian Johnson), Paul Gleason (Principal Richard Vernon), ...
Durée 97 mn.
Cinq adolescents n'ayant rien en commun sont forcés de passer un samedi entier en retenue dans leur lycée. Leurs préjugés les uns vis à vis des autres vont voler en éclats, ...
Et John Hughes changea l'image des adolescents au cinéma, à tout jamais. Si l'impact culturel de BREAKFAST CLUB est plus important de l'autre côté de l'Atlantique que chez nous, force est de constater que son regard sur la jeunesse est assez inédit. Avec ses dialogues brillants au style très particulier (si quelqu'un se demande encore qui est le maître à penser de Quentin Tarantino en matière de virtuosité dialoguée, c'est vers John Hughes qu'il faut se tourner), sa mise en scène atyipique, mélange de nonchalance et de fantaisie cartoonesque, BREAKFAST CLUB s'amuse à triturer et à remodeler tous les stéréotypes du "high school movie" (le film de lycée, véritable sous-genre aux Etats-Unis depuis les années 50).
Judd Nelson, alias John Bender |
Sous la forme d'un huis-clos (le film se déroule entièrement dans un lycée, n'en sortant qu'à l'occasion de son prologue et de son épilogue), BREAKFAST CLUB semble, dans un premier temps, ne pas avoir grand chose, sinon rien, à raconter. Cinq lycéens, une journée de retenue, une rédaction de 1000 pages à rendre. C'est mince tout ça. Mais les enjeux ne vont cesser de s'épaissir au fil des minutes. Amour, amitié, rapport (toujours conflictuels) à l'autorité, intimidations, révélations. John Hughes dissèque avec beaucoup d'humour, d'émotions mais aussi d'amertume, les tracas de l'adolescence. Coincés entre l'enfance et l'âge adulte, ces cinq personnages, magnifiquement interprétés par un casting en état de grâce, sont amené à reconsidérer ces "rôles" qu'ils se sont attribués plus ou moins volontairement.
Molly Ringwald, alias Claire Standish |
Le sportif, le voyou, l'intello, la princesse et la folle. Certains adultes (les parents et les professeurs en premier) seraient bien tentés de ne pas vouloir voir plus loin que ces étiquettes forcément réductrices. Et la même erreur pend au nez de ces cinq jeunes. L'élément perturbateur, c'est John Bender. Le voyou. Parce qu'un voyou, quoi qu'il arrive, c'est là pour ça, pour foutre le bordel. C'est une réaction attendue, mais ses motivations ne sont pas celles que l'on croit. Il n'y a rien de gratuit dans le comportement de Bender. Il ne cherche pas à provoquer juste pour en tirer une quelconque satisfaction immédiate ou pour attirer l'attention. Et l'absence d'une cellule familiale équilibrée n'est pas non plus une explication concluante. Personnage central du long-métrage, moteur narratif et émotionnel, John Bender est avant toute chose un révolutionnaire (comme le souligne le dernier plan qui le fige le poing levé en l'air) en quête de vérité et en lutte contre un monde adulte castrateur et morose. A travers les remarques souvent acerbes de Bender, tous les autres vont être amené à se poser LA question : qui je suis réellement ?
Ally Sheedy, alias Allison Reynolds |
Un stéréotype ne peut définir un adolescent. C'est la leçon que l'on peut tirer de BREAKFAST CLUB. Un stéréotype n'est rien d'autre qu'une carapace dont l'on se sert pour éloigner et/ou rassurer les adultes. Sous la carapace, l'adolescent traîne ses rêves d'enfants et l'espoir secret de ne jamais devenir un "adulte" comme les autres. Forcément en pleine mutation, il échappe à toute définition "figée". Ainsi, John Hughes multiplie les changements de rythme et d'ambiance. BREAKFAST CLUB passe du burlesque au psychodrame en passant par la comédie musicale, la romance ou encore l'action (la délirante course-poursuite dans les couloirs du lycée). Chaque émotion rencontre, à un moment ou à un autre, son contrepoint, son opposé. Même le regard posé sur le monde adulte ne peut se limiter au personnage du proviseur, cette figure autoritaire qui ne connaît rien d'autre que l'intimidation, mais qui est aussi démissionnaire du rôle qui est le sien : éduquer. Le vieux sage du lycée est en fait le concierge. Il est l'observateur discret, celui qui SAIT, celui qui n'a pas oublié qu'il fut lui aussi un adolescent.
Emilio Estevez, alias Andrew Clarke |
Revoir BREAKFAST CLUB aujourd'hui, c'est un peu comme ouvrir les yeux sur un autre monde. Celui de John Hughes, auteur singulier, chroniqueur clairvoyant des tourments de l'adolescence. Alors que ses derniers héritiers se nomment AMERICAN PIE ou bien encore DAWSON (Kevin Williamson est un fan, ça se voit), il est d'utilité publique de se replonger à la source d'un genre.
Anthony Michael Hall, alias Brian Johnson |
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