samedi 7 mai 2011

LE SURVIVANT - 7 mai 2014

Le cycle de la vie marque le pas. Le cycle de la mort, lui, tourne à plein régime. 
Trois personnes sont mortes aujourd'hui. Une quatrième est solidement attachée à un lit de l'infirmerie, bourrée de tranquillisants. Trois nouvelles tombes ont été creusées. 
Une pour Florence Ballantini. 
Une pour son enfant, Léopold. 
Et une dernière tombe pour un ami, le docteur Pierre Denoy. 

Ce virus qui réanime les morts en les dotant au passage d'une fringale contre-nature vient de nous jouer un tour de pute auquel personne ne s'attendait. Nous savions que le virus se propage dans l'air, mais aussi par le sang et la salive. Nous le respirons tous, mais il ne devient actif que lorsque le cœur cesse de battre. Oui, ça nous le savions. Ce que nous ignorions en revanche, c'est que le virus contamine le lait maternel. Comme un poison qui, lentement mais sûrement contamine le nouveau-né qui s'en nourrit. Le petit Léopold s'est alimenté au sein de sa mère et chaque gorgée nourrissaient son organisme encore trop faible en doses mortelles, le transformant en mort-vivant. Et en mordillant les tétons de sa mère, il l'a contaminée à son tour. Le résultat était atroce. Et, entre l'apparition de la fièvre qui suit une morsure et précède la transformation, et le décès  à proprement parler, suivi de la réanimation, ça a été particulièrement fulgurant. 
Une plaisanterie m'était venu à propos de bébés zombies. Je crois bien que cela ne m'amusera plus jamais.

Avant de mourir d'une morsure au bras, le docteur Denoy nous a tous racontés. Toussant entre chaque mot ou presque et transpirant à grosses gouttes. 
La mère et le bébé se sont présentés à l'infirmerie au petit matin. A son réveil, Thomas Ballantini a constaté que sa femme était assise au bord du lit, donnant le sein à son bébé, gémissante, dans un état second. Le bébé avait pris une teinte violacée mais continuait pourtant de téter, fermement, le sein gauche. Mais ce n'était plus du lait qui coulait depuis ce téton, mais du sang. Et il coulait à flot. Et le bébé s'en gorgeait, petit être vorace. Le père a jeté une couverture sur les épaules de sa femme, dissimulant ainsi le bébé, et les a amenés en urgence à l'infirmerie, réveillant le docteur Denoy. 
Un examen rapide a permis à Denoy de voir l'étendue de la catastrophe. Le bébé était déjà un mort-vivant et sa mère était en train de le suivre à toute vitesse, prises de convulsions. C'est alors que le bon docteur a voulu séparer la mère du bébé. Le père s'est interposé et a envoyé Denoy à terre. Thomas Ballantini a voulu prendre sa femme et son enfant dans ses bras, fou de chagrin. Denoy a vu les mâchoires de la femme s'approcher de la gorge du père et est intervenu à son tour, projetant Thomas à bonne distance d'un violent coup d'épaule. Ce vestige d'un passé de rugbyman lui a permis de sauver une vie mas pas la sienne. La mère n'avait rien du zombie habituel aux mouvements raides et mal coordonnés. C'était une furie, une enragée, sa parodie de bébé solidement accroché à sa mamelle sanguinolente. Elle a plaqué le docteur au sol et lui a arraché d'un coup de dents une partie de l'avant-bras, là où la chair est tendre. Elle aurait probablement poursuivi son festin si Verney et l'infirmière Gueydan ne s'était pas pointé à ce moment là. Ils dormaient ensemble dans la chambre à côté et ont pu agir tout de suite. C'est un Verney en caleçon et pieds nus qui a abattu la mère d'une balle dans la tête. Puis Verney a vu le bébé. Il avait finalement lâché prise dans la chute de sa mère et gisait sur le sol, ouvrant une bouche remplie d'un sang noir et visqueux, incapable de hurler comme tant de nourrissons le font pourtant si bien. Le père a supplié d'épargner l'enfant. Verney ne l'a pas écouté. Il a levé son arme et a mis fin aux jours du bébé-zombie. C'était le tour du docteur mais Verney l'a finalement laissé vivre. Assez longtemps pour qu'il raconte ce qui s'était passé.

Le docteur Denoy a survécu cinq heures à sa blessure. C'est à moi qu'il a demandé de l'achever. Parce qu'il avait confiance en moi et qu'il m'appréciait et me respectait. Je lui ai fait cet honneur. 

Dans un lit voisin, Thomas Ballantini, attaché par des sangles pour éviter qu'il ne se fasse du mal, délire. Il pleure et il délire. J'espère pour lui que sa femme et son fils ne viendront pas lui rendre visite comme Carole, Thibaut et d'autres viennent parfois me rendre visite. 

Ainsi, le virus zombie nous enlève aussi nos nouveaux-nés, précipitant encore un peu plus vite l'extinction de la race humaine. S'il y a d'autres survivants ailleurs, ils ont surement dû s'en rendre compte à présent. Le lait maternel est un autre mode transmission du virus, multipliant même ses effets. Le bébé Léopold ayant probablement été conçu avant l'épidémie du virus, ce qui explique qu'il soit né sain. Mais qui nous dit que notre sperme n'est pas également contaminé et que les bébés à venir ne soient pas des monstres en puissance ?

2 commentaires:

  1. Oulà, bien atroce le coup du virus ! Mais dis-moi, tu veux tous les tuer et le faire repartir sur la route ?

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