vendredi 29 avril 2011

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #31 - L'ETOFFE DES HEROS

Réalisé par Philip Kaufman - Sortie US le 21 octobre 1983 - Titre original : The Right Stuff.
Scénario : Philip Kaufman, d'après le livre de Tom Wolfe.
Musique : Bill Conti.
Directeur de la photographie : Caleb Deschanel.
Avec Sam Shepard (Chuck Yeager), Scott Glenn (Alan Shepard), Ed Harris (John Glenn), Dennis Quaid (Gordon "Gordo" Cooper), Fred Ward (Gus Grissom), Barbara Hershey (Glennis Yeager), ...
Durée : 193 mn.
De 1947 à 1963, les exploits en parallèle de Chuck Yeager, premier pilote à briser le mur du son, et des 7 astronautes du programme spatial Mercury, avides de vitesse et de gloire, ...




Un homme, un vrai, c'est quoi ? C'est à cette question, obsession purement machiste diront certains, que tente de répondre avec aplomb le cinéaste Philip Kaufman à travers ce classique du cinéma américain. Héritier direct du western façon John Ford, L'ETOFFE DES HEROS substitue à la conquête de l'Ouest la conquête de l'Espace en pleine Guerre Froide. Quoi de plus pertinent, en effet, que de s'interroger sur la nature du mâle à travers le prisme de ce qui fut une incessante course aux exploits tant humains que technologiques et scientifiques ? Sur une période d'un peu plus de quinze ans, le cinéaste décrit avec un mélange de fascination et d'ironie comment les Etats-Unis, un pays qui n'a jamais vraiment su discerner la frontière entre réalité et fiction, n'a cessé de vouloir se forger des héros, certains éphémères, d'autres immortels.
Le scénario, dans un jeu de va et vient, oppose le parcours solitaire de Chuck Yeager à celui, collectif et ultra-médiatique, des astronautes du programme que la toute jeune NASA baptisa Mercury. Le premier constitue le centre spirituel, mystique même, de l'histoire. Les autres symbolisent un courage, certes totalement authentique, mais qui tend à se disperser dans des ambitions superficielles et égocentriques (le terrifiant malaise conjugal lors de "l'échec" de l'astronaute Gus Grissom, miné par l'amertume de sa femme qui se lamente de n'avoir pas pu rencontrer Jackie Kennedy est un exemple parmi tant d'autres). Philip Kaufman ne manque pas une seule occasion de démontrer l'immaturité totale de ces hommes (le regard que les femmes portent sur eux est incroyablement révélateur) qui rêvent de gloire en bombant le torse, conscient qu'ils ne sont que le jouet d'hommes politiques ridicules (le film dresse un portrait vraiment peu flatteur de Lyndon B. Johnson, vice président de John F. Kennedy, ce en quoi l'Histoire ne saurait lui donner tort d'ailleurs) mais bien décidé à savourer chaque minute de leur gloire nouvellement acquise. De leur mise en condition physique, aux premiers voyages en orbite terrestre, et en passant par les tests (spectaculairement foireux) des fusées de la NASA, c'est un humour corrosif qui irrigue chacune de ces séquences. En clair, le programme Mercury, aussi spectaculaire et audacieux qu'il puisse nous apparaître, ne fut rien d'autre qu'une grande parade avec fanfare mené par une bande de pieds nickelés.
A contrario, et bien qu'infiniment plus modeste en apparence (les médias se sont vite lassés de lui), les exploits accomplis par Yeager (idéalement interprété par le supra-viril Sam Shepard) ont une résonance bien plus profonde. Ce n'est pas l'envie de se faire mousser ou de prouver qu'il en a dans le pantalon qui pousse Yeager à fendre les airs à bord d'avions supersoniques expérimentaux, mais la quête d'un absolu, d'un "démon" vivant caché dans les cieux (Dieu ?). Yeager n'a pas plus peur de la mort (un vieil homme au teint pâle et qui n'a même pas besoin de parler pour faire comprendre aux épouses de pilote qu'elles sont désormais des veuves) que d'échouer face aux caméras du monde entier ou encore de perdre son job au profit de chimpanzés grimaçants. L'homme, le vrai, c'est lui. 


Drôle, spectaculaire, épique, interprété à la perfection (Dennis Quaid, Ed Harris, Scott Glenn et Fred Ward y imprimèrent définitivement leur image de tough guys aux trognes inoubliables), L'ETOFFE DES HEROS est un biopic à nul autre pareil, véloce comme un avion de chasse et envoûtant comme le derrière bombé d'une déesse playboy des sixties. Mille fois copié, jamais égalé !

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