dimanche 17 avril 2011

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #19 - LE SOLITAIRE

Réalisé par Michael Mann - Sortie US le 27 mars 1981.
Avec James Caan, Tuesday Weld, Willie Nelson, ...

LE SOLITAIRE est le premier long-métrage cinéma de Michael Mann (après le téléfilm COMME UN HOMME LIBRE) et il sonne comme une note d'intention pour toute sa carrière à venir, sur petit comme sur grand écran. Le score aérien et synthétique du groupe Tangerine Dream, la poésie urbaine des scènes de nuit, un regard unique sur les criminels professionnels, un spleen tenace, le goût de la tragédie et une mise en scène à la précision chirurgicale sont des éléments qui se retrouveront tous à des degrés divers dans les films suivants de Michael Mann
Incarné par un James Caan en état de grâce, Frank, le personnage principal, est un voleur génial. Personne ne sait ouvrir un coffre-fort avec autant de dextérité que lui et son équipe. Pour camoufler ses activités criminelles, Frank joue les vendeurs de voitures. Un soir, il rencontre Jessie et tombe amoureux. Il y voit l'occasion de réaliser son rêve : fonder une famille. Après un dernier gros coup, il ambitionne de raccrocher pour mener une vie normale. Mais ses associés, mafieux et flics corrompus, vont tout foutre en l'air.
Passionné de photographie, Mann créé un cinéma entièrement tourné vers le regard, l'attention aux détails, entre réalisme documentaire et contemplation artistique. LE SOLITAIRE s'ouvre sur un casse organisé avec une précision d'horloger et que la mise en scène s'applique à retranscrire avec le minimum de dialogues et le maximum de crédibilité. 
Mais, ne perdant jamais de vue ses personnages, Mann en profite également pour établir la personnalité et les dilemmes de son héros. Frank est un être seul, évoluant comme une ombre, avec une discrétion absolue mais il ne peut pas vraiment savourer ses dons parce qu'il évolue dans un monde en marge de la société. Le don de Frank est aussi sa malédiction. Son "travail" de jour n'est qu'une façade, un mensonge. Et lorsqu'il tente d'adopter un enfant, son passé de taulard lui est jeté à la figure avec un tel mépris que sa douleur se transforme en un assaut verbal à la violence si longtemps réprimé. C'est sa tragédie. Par goût du risque, par nature, il a choisi une vie dangereuse mais excitante. Son équipe est une famille de substitution, comme le personnage incarné par Willie Nelson peut-être vu comme une figure paternelle évidente. L'ajout d'une femme (Tuesday Weld, superbe) à sa vie sera pour lui la seule occasion d'entrevoir et de ressentir une autre vie, sereine, adulte et responsable. Son idéal. Comme ce sera toujours le cas par la suite (HEAT, LE DERNIER DES MOHICANS, PUBLIC ENEMIES), Mann fait de son personnage féminin une muse pour son héros, l'élément déclencheur d'un bouleversement émotionnel et moral. Un point d'ancrage fort autour duquel le héros devra prendre des décisions capitales.
Avec un talent étourdissant, Michael Mann dirige un drame sincère et émouvant, à la fois fermement ancré dans son époque (le matérialisme comme donnée essentielle du bonheur moderne, les costumes, les éclairages) mais néanmoins porteur d'aspirations universelles (on rêve tous de briser ses chaînes et de vivre une autre vie, de profiter d'une nouvelle chance). 
Dernier détail amusant : LE SOLITAIRE fut produit par Jerry Bruckeihmer. La preuve indéniable que, quoi qu'on puisse en dire, ce monsieur a toujours eu du goût !


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