jeudi 28 avril 2011

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #30 - BRISBY ET LE SECRET DE NIMH

Réalisé par Don Bluth - Sortie US le 2 juillet 1982 - Titre original : The Secret of NIMH.
Scénario : Don Bluth & John Pomeroy & Gary Goldman & Will Finn, d'après le roman de Robert C. O'Brien "Mrs Frisby & the Rats of NIMH".
Musique : Jerry Goldsmith.
Avec les voix (VO) de Sir Derek Jacobi (Nicodemus), Elizabeth Hartman (Mrs Brisby), Arthur Malet (Mr Ages), Dom DeLuise (Jeremy), Hermione Baddeley (Auntie Shrew), Shannen Doherty (Teresa), Wil Wheaton (Martin), ...
Durée : 82 mn.
Veuve depuis peu, Mrs Brisby est une souris qui vit avec ses enfants dans un bloc de ciment au mileu du champ d'une famille de fermiers. Inquiète pour la santé de l'un de ses fils et menacée de devoir fuir face au tracteur qui menace de détruire son logement, elle part demander l'aide des rats qui vivent dans le rosier et de leur dirigeant, le vieux sage Nicodemus, ...



BRISBY & LE SECRET DE NIMH est né de l'ambition d'une poignée d'animateurs ambitieux ayant quitté le giron de Disney, soucieux de rendre à l'animation américaine ses lettres de noblesse. C'est précisément à cette époque (fin des années 70, début des années 80) que la production de la firme à la souris, en pleine crise créative, commence à marquer le pas, incapable de se renouveler (BERNARD & BIANCA et ROX & ROUKY sont les grandes productions de cette période, c'est dire que la périodes des classiques est déjà loin). Distribué par la MGM, BRISBY ... devient donc le premier long-métrage de la compagnie Don Bluth Productions et, malgré son statut évident de film d'animation grand public (animaux héroïques, chanson - un peu - mielleuse et humour bon enfant), il ne fait aucun doute qu'il s'agit là d'un classique instantané. 
Eu égard au budget investi (largement inférieur à n'importe quelle production Disney), BRISBY & LE SECRET DE NIMH est d'une richesse visuelle hallucinante. Empruntant ses ambiances à une imagerie fantasy qui évoque tout autant le BLANCHE NEIGE ET LES SEPT NAINS de Walt Disney que les planches d'Alan Lee et de John Howe pour LE SEIGNEUR DES ANNEAUX, le métrage de Don Bluth joue la carte de l'opulence et du détail, jamais alourdi grâce à une animation fluide et dynamique. L'impression d'un danger constant est parfaitement soulignée par les différents environnements que l'héroïne, la courageuse Mrs Brisby, traverse au cours de son périple pour mettre sa famille à l'abri. Le repaire grouillant d'insectes du vieux Hibou, la cité souterraine et gothique des rats, la demeure poussiéreuse des fermiers ou encore des champs aussi vastes, sombres et touffus que la forêt de Mirkwood dans BILBO LE HOBBIT. Toujours dans le même esprit, de nombreux personnages font leur entrée en scène de la manière la plus inquiétante qui soit. Le vieux Hibou écrase une araignée de ses serres puissantes avant de faire pivoter sa tête dans un craquement horrible, le vaillant Justin (le sosie d'Errol Flynn version rongeur) se glisse silencieusement derrière une insouciante Mrs Brisby, la suivant telle une ombre à la manière d'un Michael Myers, et le vieux Nicodemus déchaîne un torrent de lumières spectrales en invitant la même Mrs Brisby à pénétrer dans son antre. On le voit bien, amoureux d'un cinéma fantastique à l'ancienne, de science-fiction littéraire (l'ombre de Jules Verne et Ray Bradbury planent sur de nombreuses séquences, notamment le flash-back cauchemardesque où l"origine de l'intelligence supérieure des rats nous est révélée) et de dark fantasy, Don Bluth n'hésite pas un seul instant à faire dériver son conte pour enfants vers les rives de l'épouvante gothique, quitte à effrayer les plus jeunes enfants. Cette valse d'influences et d'ambitions formelles culminent dans un climax apocalyptique où se succèdent luttes de pouvoir, trahisons, duel à l'épée, morts violentes, prophéties et suspense insoutenable (le domicile de Mrs Brisby qui s'enfoncent lentement dans la boue, noyant peu à peu sa famille).
Cette débauche visuelle ne serait bien sûr pas grand chose sans une narration solide et une histoire qui se tient. Si l'on met de côté les pitreries attachantes mais parfois hors-sujet de Jeremy, le corbeau maladroit et bavard, BRISBY & LE SECRET DE NIMH ne manque pas de cœur et de potentiel dramatique. Englobant le combat d'une veuve pour protéger les siens et l'exode planifié d'une colonie de rats dont l'intelligence est tout autant un don qu'une malédiction, le scénario, bien écrit et palpitant, a le mérite de ne pas prendre le public pour des idiots et de présenter un ensemble de personnages consistants. Mention spéciale à Jenner, fourbe politicien meurtrier, et à Dragon, chat teigneux aux instincts de prédateurs aiguisés et à mille lieux des félins maladroits dont les cartoons sont pourtant si friands. 



Victime d'une promotion quasi-inexistante et d'une distribution expéditive et mal pensée, le joyau de Don Bluth fut pourtant un échec cuisant qui faillit mettre un terme aux activités de Don Bluth et de ses complices Gary Goldman et John Pomeroy. Il faudra l'appui d'un certain Steven Spielberg pour qu'ils reviennent sur le devant de la scène quatre ans plus tard à l'occasion de FIEVEL ET LE NOUVEAU MONDE, une autre histoire de souris.

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