vendredi 29 avril 2011

LE SURVIVANT - 29 avril 2014

Carole est morte dans le courant de la nuit. Elle est morte dans mes bras. C'est ce coup de rangers dans les côtes qui est le principal responsable. Poumon perforé. Sa respiration est devenue de plus en plus difficile, horriblement sifflante. Son visage est devenu tout bleu, un bleu très pâle, ses lèvres violacées. Elle s'est asphyxiée, lentement, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien d'autre à faire.
Nous étions nous vraiment aimés ? Est-ce que c'était juste pour combattre la solitude ?

Elle est morte les yeux ouverts. Je les ai refermé aussi délicatement que possible. Puis, j'ai attendu.

Elle a rouvert les yeux, finalement. Et j'ai encore attendu.

Elle a fixé son regard, un mélange d'avidité, de curiosité et de mort, sur le mien. J'ai pleuré et là j'ai compris que je l'avais vraiment aimé. Alors, j'ai ôté la sécurité sur mon arme. Et j'ai encore attendu.

Elle a voulu se relever. J'ai levé mon arme. J'ai visé. 

J'ai pressé la détente.

Il restait encore de l'eau dans ma bouteille. Je m'en suis servi pour lui nettoyer le visage du mieux que j'ai pu.
Je suis retourné au parking et aux camions abandonnés. J'ai brûlé son corps avec ceux de mes compagnons morts, assassinés, hier.

Le capitaine Thibault.
Le caporal Larivière.
Jonathan Salers.
Le soldat Pinal.
Le soldat Duroche.
Le soldat Moreau.
Il y avait des zombies. Des tas. J'en ai tué autant que j'avais de balles dans mon chargeur.

Puis j'ai repris la direction du camp. J'y suis parvenu à la tombée de la nuit. Le soldat Deschain, inlassable sentinelle, m'a vu et a fait ouvrir les grilles.

Quel visage ai-je pu présenter à la quinzaine de personnes qui se sont pressés autour de moi ?

"Verney nous a dit qu'il t'avait vu mourir."

Mais je ne suis pas mort. Non. J'ai survécu.

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #31 - L'ETOFFE DES HEROS

Réalisé par Philip Kaufman - Sortie US le 21 octobre 1983 - Titre original : The Right Stuff.
Scénario : Philip Kaufman, d'après le livre de Tom Wolfe.
Musique : Bill Conti.
Directeur de la photographie : Caleb Deschanel.
Avec Sam Shepard (Chuck Yeager), Scott Glenn (Alan Shepard), Ed Harris (John Glenn), Dennis Quaid (Gordon "Gordo" Cooper), Fred Ward (Gus Grissom), Barbara Hershey (Glennis Yeager), ...
Durée : 193 mn.
De 1947 à 1963, les exploits en parallèle de Chuck Yeager, premier pilote à briser le mur du son, et des 7 astronautes du programme spatial Mercury, avides de vitesse et de gloire, ...




Un homme, un vrai, c'est quoi ? C'est à cette question, obsession purement machiste diront certains, que tente de répondre avec aplomb le cinéaste Philip Kaufman à travers ce classique du cinéma américain. Héritier direct du western façon John Ford, L'ETOFFE DES HEROS substitue à la conquête de l'Ouest la conquête de l'Espace en pleine Guerre Froide. Quoi de plus pertinent, en effet, que de s'interroger sur la nature du mâle à travers le prisme de ce qui fut une incessante course aux exploits tant humains que technologiques et scientifiques ? Sur une période d'un peu plus de quinze ans, le cinéaste décrit avec un mélange de fascination et d'ironie comment les Etats-Unis, un pays qui n'a jamais vraiment su discerner la frontière entre réalité et fiction, n'a cessé de vouloir se forger des héros, certains éphémères, d'autres immortels.
Le scénario, dans un jeu de va et vient, oppose le parcours solitaire de Chuck Yeager à celui, collectif et ultra-médiatique, des astronautes du programme que la toute jeune NASA baptisa Mercury. Le premier constitue le centre spirituel, mystique même, de l'histoire. Les autres symbolisent un courage, certes totalement authentique, mais qui tend à se disperser dans des ambitions superficielles et égocentriques (le terrifiant malaise conjugal lors de "l'échec" de l'astronaute Gus Grissom, miné par l'amertume de sa femme qui se lamente de n'avoir pas pu rencontrer Jackie Kennedy est un exemple parmi tant d'autres). Philip Kaufman ne manque pas une seule occasion de démontrer l'immaturité totale de ces hommes (le regard que les femmes portent sur eux est incroyablement révélateur) qui rêvent de gloire en bombant le torse, conscient qu'ils ne sont que le jouet d'hommes politiques ridicules (le film dresse un portrait vraiment peu flatteur de Lyndon B. Johnson, vice président de John F. Kennedy, ce en quoi l'Histoire ne saurait lui donner tort d'ailleurs) mais bien décidé à savourer chaque minute de leur gloire nouvellement acquise. De leur mise en condition physique, aux premiers voyages en orbite terrestre, et en passant par les tests (spectaculairement foireux) des fusées de la NASA, c'est un humour corrosif qui irrigue chacune de ces séquences. En clair, le programme Mercury, aussi spectaculaire et audacieux qu'il puisse nous apparaître, ne fut rien d'autre qu'une grande parade avec fanfare mené par une bande de pieds nickelés.
A contrario, et bien qu'infiniment plus modeste en apparence (les médias se sont vite lassés de lui), les exploits accomplis par Yeager (idéalement interprété par le supra-viril Sam Shepard) ont une résonance bien plus profonde. Ce n'est pas l'envie de se faire mousser ou de prouver qu'il en a dans le pantalon qui pousse Yeager à fendre les airs à bord d'avions supersoniques expérimentaux, mais la quête d'un absolu, d'un "démon" vivant caché dans les cieux (Dieu ?). Yeager n'a pas plus peur de la mort (un vieil homme au teint pâle et qui n'a même pas besoin de parler pour faire comprendre aux épouses de pilote qu'elles sont désormais des veuves) que d'échouer face aux caméras du monde entier ou encore de perdre son job au profit de chimpanzés grimaçants. L'homme, le vrai, c'est lui. 


Drôle, spectaculaire, épique, interprété à la perfection (Dennis Quaid, Ed Harris, Scott Glenn et Fred Ward y imprimèrent définitivement leur image de tough guys aux trognes inoubliables), L'ETOFFE DES HEROS est un biopic à nul autre pareil, véloce comme un avion de chasse et envoûtant comme le derrière bombé d'une déesse playboy des sixties. Mille fois copié, jamais égalé !

jeudi 28 avril 2011

LE SURVIVANT - 28 avril 2014

Ce n'est pas parce que l'on passe son temps à envisager le pire que l'on se retrouve moins surpris lorsque celui-ci arrive. Les évènements de ces douze dernières heures, un cauchemar dont j'espère encore pouvoir me réveiller, sont venus me le rappeler. 
Le camp s'est réveillé bien plus tôt prévu. Mais c'était pour une bonne cause, après tout. Florence Ballantini, enceinte jusqu'aux yeux, a perdu les eaux un peu avant l'aube et les premières contractions ont suivi aussitôt. Nous l'avons laissé aux bons soins du docteur Denoy et de son infirmière et avons quitté le camp à l'heure prévue, en nous promettant de ne pas tarder pour revenir au plus vite afin de fêter cette naissance. Je ne suis toujours pas impatient d'être réveillé en pleine nuit par les pleurs d'un enfant en bas âge, mais une naissance reste une bonne nouvelle. Par les temps qui courent, c'est mieux qu'un coup de pied au cul.

J"aimerais pouvoir dire que nous sommes tous revenus pour admirer le nouveau né et lever nos verres à la santé des heureux parents. Mais ce serait vous mentir.
Le blindé et les deux camions (un camion supplémentaire pour le bétail,), ont franchis les grilles du camp en direction de la fumée noire, toujours aussi visible malgré une matinée brumeuse. Thibault, le caporal Salia et le soldat Pinal dans le blindé (en tête), le sergent-chef Verney et les soldats Duroche et Moreau dans le premier camion (milieu du convoi) et le caporal Larivière, notre chaperon, avec Jonathan, Carole et moi-même dans le deuxième camion (en queue de convoi). Tous armés, organisés, préparés. 
La fumée noire provenait d'une gigantesque pile de pneus à laquelle avait été ajoutées quelques palettes de bois pour faire bonne mesure, sur un parking quasiment désert. Il n'y avait qu'une dizaine de zombies dans les parages, six voitures abandonnées et rien d'autres. Plus aucune voiture n'avait ses pneus. Une caravane blanche était rattachée à l'une de ces voitures. Sur le flanc de la caravane avait été peint en grandes lettres vertes le message suivant : SURVIVANTS ! NOUS AVONS FAIM ! AIDEZ NOUS ! La première chose que je me suis dit, c'est que les occupants du véhicule, en fuite comme tant d'autres, avait fini par échouer ici, à court d'essence, et qu'ils avaient allumés ce feu pour attirer un éventuel bon samaritain. Sur ce dernier point, je ne me suis pas trompé au moins. Pour le reste, c'était un piège et nous sommes tombés dans le panneau si facilement. 
Pour éviter de rameuter d'autres cadavres ambulants, le capitaine Thibault et le soldat Pinal sont descendus du blindé pour examiner la caravane. Fusil au poing, Thibault est resté en retrait, couvrant Pinal depuis l'avant du blindé. Je ne peux pas m'ôter de l'esprit le silence absolu de ces quelques instants. Le calme avant la tempête. Pinal a frappé à la porte du caravane. Il s'est identifié et a demandé aux occupants de sortir, promettant sécurité, hébergement et nourriture. Personne n'a répondu. Il a saisi la poignée et ouvert la porte. Tout s'est passé très vite ensuite. Un zombie lui est tombé dessus, suivi de deux autres. Il n'a même pas eu le temps de vider un chargeur ou de crier. La mâchoire pourrie du mort-vivant s'est refermée sur sa gorge, et une autre est venue lui prendre son oreille. Thibault a ouvert le feu immédiatement, tuant sans attendre les trois zombies sur le point de festoyer. Pinal était agonisant, bientôt mort, bientôt zombie. Thibault s'est approché et l'a achevé pour couper court au processus. 
C'est alors que le vrai merdier s'est abattu sur nous. Des rafales de mitrailleuses, venant de tous les côtés. Ne nous laissant pas la moindre chance de nous défendre. Thibault s'est effondré, touché à de multiples reprises, baignant dans son propre sang. Insensible aux tirs, le blindé a démarré, tentant dans sa manœuvre d'apporter à nos camions un semblant de couverture mais bien trop tard. Dans le camion devant nous, Duroche et Moreau, criblés de balles, se sont effondrés sous une pluie de verre. Verney s'est extirpé de la cabine, tirant pour se protéger du mieux possible. Une balle lui a traversé le mollet, le clouant  au sol. Puis ce fut notre tour. Le caporal Larivière a engagé la marche arrière. Sa tête a explosé sous l'impact du feu nourri, nous éclaboussant de sang, d'os et de cervelles. Jonathan a ouvert la porte, tirant Carole avec lui en se jetant à terre. Dans le vacarme, il m'a crié quelque chose, difficile de dire quoi. Sûrement de le suivre. Je me suis jeté à mon tour hors du camion, des éclats de verre me lacérant les mains et le visage. J'ai atterri sur mon cul, laissant mon arme sur le siège du passager. Jonathan s'était déjà relevé pour riposter, mais pas pour longtemps. Il est mort à son tour, fauché par une nouvelle rafale. Carole était toujours au sol, aussi pétrifiée que moi. J'ai juste eu le réflexe de me saisir de l'arme de Jonathan. J'ai pris la main de Carole et nous nous sommes glissés sous le camion. Puis j'ai vu Verney se traîner jusqu'au blindé. La trappe latérale s'est ouverte et une main est venu l'aider à se hisser à bord mais pas avant qu'une autre balle ne vienne lui fracasser le poignet. Je l'ai entendu crier. Il s'est retourné vers moi. Nos regards se sont croisés. Puis il a disparu à l'intérieur du blindé et la trappe s'est refermé. Ils ont démarré en trombe, nous abandonnant. Carole a hurlé mais ça n'a rien changé. Les tirs se sont poursuivis quelques instants, arrosant le blindé, ricochant sur ses parois dans un festival d'étincelles. Le blindé s'est éloigné et à finit par disparaître. Les tirs se sont arrêtés aussi vite qu'ils avaient débuté. Nous étions seuls à présent. Seuls sous ce putain de camion. Seuls pendant ce qui m'a paru être une éternité.
Des rires se sont alors fait entendre. Trois individus au crâne rasé sont sortis de leurs cachettes respectives, lourdement armés. Ils ne nous avaient heureusement pas encore vus, pensais-je. Et dans le chaos de la fusillade, les cris de Carole avaient dû passer inaperçus. Je l'espérais sincèrement. Une fois de plus j'avais tort. "Sortez de là-dessous mes mignons ! On sait que vous êtes là ! Vos enculés de petits copains vous ont laissé crever comme des chiens ! Lâchez vos armes, sortez et on ne vous fera rien ! Promis !" Impossible de croire ces fils de putes. Nous n'avons pas bougés. Et ils ont à nouveau ouvert le feu, pour nous déloger. Les tirs ont percé le réservoir. En quelques secondes, nous baignions dans l'essence. "Dernier avertissement mes jolis ! Sortez ou on vous fait cramer les fesses !" Nous nous sommes traîner de dessous le camion. L'un des membres du trio a tiré dans les morts-vivants qui commençaient à s'approcher un peu trop. Un autre, le chef sans doute, est venu vers moi. "Bon chienchien." Et puis un grand coup de crosse dans la gueule. J'ai entendu Carole crier puis plus rien, le noir complet.

Pendant combien de temps ? Quelques heures, au moins. 

Ils nous avaient traînés dans un sous-bois.

Ce sont les hurlements de Carole qui m'ont réveillés. Mais pas seulement. Il y avait aussi ce liquide chaud et puant qui m'aspergeait le visage, brûlant chacune de mes nombreuses plaies. L'enfoiré qui m'avait envoyé au tapis me pissait dessus. Les deux autres s'occupaient de Carole. L'un la tenait. L'autre la violait à même le sol. Ils souriaient tous les trois. Comme de gros connards dégénérés. La vessie soulagée, le chef a remonté sa braguette et s'est dirigé vers Carole. Il lui a décoché un grand coup de pied dans les côtes. Je les ai entendu craquer. D'autres hurlements. D'autres rires gras. 
J'étais assis, appuyé contre un tronc d'arbre, les mains et les chevilles liés. Mon seul avantage, c'est que mes mains n'étaient pas dans mon dos mais devant moi. Il y avait ce stylo dans ma poche, mon vieux stylo plume avec lequel j'ai noirci pas mal de pages. Trop occupés à "s'amuser" avec Carole, ils ne m'ont pas vu le prendre, dévisser le bouchon et le cacher dans la paume de mes mains. Et puis le chef s'est à nouveau approché. Très très près. Une haleine de chiotte, mélange de bières bon marché et de tabac froid. Je n'ai pas hésité. Pas le choix. Je lui planté mon stylo dans l'œil, l'enfonçant le plus loin possible, le tournant brutalement dans la plaie béante d'un coup de poignet. Ce porc s'est effondré. Il avait une arme à la main. Mon arme. J'ai lâché le stylo, j'ai récupéré l'arme et j'ai ouvert le feu. Je les ai tué tous les deux. L'un des deux avait ouvert pour la bouche pour dire quelque chose. "On voulait seulement ...". Il n'a pas eu le temps de terminer.
Carole s'est relevée, péniblement et s'est rhabillée. Elle est venu me détacher. Puis elle s'est effondré dans mes bras, pleurant à s'en faire exploser le cœur. Il y avait des traces de chaussures sur ses doigts enflés. Ils en avaient quelques uns. Probablement leur concept des préliminaires. Et les zombies se sont pointés. Attirés par les cris, les coups de feu et la viande encore fumante gisant à terre. Nous avons fui et les avons laissé manger en paix. Ils nous ont à peine remarqué et ils ne nous ont pas suivi.

Nous sommes retournés sur le parking. Les deux camions à l'arrêt étaient encore là, le notre dans une grande flaque d'essence. Le feu qui nous avait attiré ici en premier lieu avait été éteint. Les cadavres laissés là. 
Nous avons récupérés nos sacs, bien plus légers que lors de notre départ ce matin. J'ai essayé de faire démarrer l'autre camion, mais en vain. Le moteur n'a pas été épargné par la fusillade. Ce n'était pas les véhicules qu'ils voulaient. Ils ont pris nos armes, les quelques médicaments que nous transportions (pour les premiers soins) et notre eau.

Nous avons trouvé un abri pour passer la nuit, des toilettes publiques sur le bord de la route. Mieux que rien. Carole est dans un sale état mais je ne suis pas médecin. Nous rentrerons au camp demain, si nous y arrivons. Et Denoy pourra la soigner. Après ça, j'irais trouver Verney et je le tuerais.

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #30 - BRISBY ET LE SECRET DE NIMH

Réalisé par Don Bluth - Sortie US le 2 juillet 1982 - Titre original : The Secret of NIMH.
Scénario : Don Bluth & John Pomeroy & Gary Goldman & Will Finn, d'après le roman de Robert C. O'Brien "Mrs Frisby & the Rats of NIMH".
Musique : Jerry Goldsmith.
Avec les voix (VO) de Sir Derek Jacobi (Nicodemus), Elizabeth Hartman (Mrs Brisby), Arthur Malet (Mr Ages), Dom DeLuise (Jeremy), Hermione Baddeley (Auntie Shrew), Shannen Doherty (Teresa), Wil Wheaton (Martin), ...
Durée : 82 mn.
Veuve depuis peu, Mrs Brisby est une souris qui vit avec ses enfants dans un bloc de ciment au mileu du champ d'une famille de fermiers. Inquiète pour la santé de l'un de ses fils et menacée de devoir fuir face au tracteur qui menace de détruire son logement, elle part demander l'aide des rats qui vivent dans le rosier et de leur dirigeant, le vieux sage Nicodemus, ...



BRISBY & LE SECRET DE NIMH est né de l'ambition d'une poignée d'animateurs ambitieux ayant quitté le giron de Disney, soucieux de rendre à l'animation américaine ses lettres de noblesse. C'est précisément à cette époque (fin des années 70, début des années 80) que la production de la firme à la souris, en pleine crise créative, commence à marquer le pas, incapable de se renouveler (BERNARD & BIANCA et ROX & ROUKY sont les grandes productions de cette période, c'est dire que la périodes des classiques est déjà loin). Distribué par la MGM, BRISBY ... devient donc le premier long-métrage de la compagnie Don Bluth Productions et, malgré son statut évident de film d'animation grand public (animaux héroïques, chanson - un peu - mielleuse et humour bon enfant), il ne fait aucun doute qu'il s'agit là d'un classique instantané. 
Eu égard au budget investi (largement inférieur à n'importe quelle production Disney), BRISBY & LE SECRET DE NIMH est d'une richesse visuelle hallucinante. Empruntant ses ambiances à une imagerie fantasy qui évoque tout autant le BLANCHE NEIGE ET LES SEPT NAINS de Walt Disney que les planches d'Alan Lee et de John Howe pour LE SEIGNEUR DES ANNEAUX, le métrage de Don Bluth joue la carte de l'opulence et du détail, jamais alourdi grâce à une animation fluide et dynamique. L'impression d'un danger constant est parfaitement soulignée par les différents environnements que l'héroïne, la courageuse Mrs Brisby, traverse au cours de son périple pour mettre sa famille à l'abri. Le repaire grouillant d'insectes du vieux Hibou, la cité souterraine et gothique des rats, la demeure poussiéreuse des fermiers ou encore des champs aussi vastes, sombres et touffus que la forêt de Mirkwood dans BILBO LE HOBBIT. Toujours dans le même esprit, de nombreux personnages font leur entrée en scène de la manière la plus inquiétante qui soit. Le vieux Hibou écrase une araignée de ses serres puissantes avant de faire pivoter sa tête dans un craquement horrible, le vaillant Justin (le sosie d'Errol Flynn version rongeur) se glisse silencieusement derrière une insouciante Mrs Brisby, la suivant telle une ombre à la manière d'un Michael Myers, et le vieux Nicodemus déchaîne un torrent de lumières spectrales en invitant la même Mrs Brisby à pénétrer dans son antre. On le voit bien, amoureux d'un cinéma fantastique à l'ancienne, de science-fiction littéraire (l'ombre de Jules Verne et Ray Bradbury planent sur de nombreuses séquences, notamment le flash-back cauchemardesque où l"origine de l'intelligence supérieure des rats nous est révélée) et de dark fantasy, Don Bluth n'hésite pas un seul instant à faire dériver son conte pour enfants vers les rives de l'épouvante gothique, quitte à effrayer les plus jeunes enfants. Cette valse d'influences et d'ambitions formelles culminent dans un climax apocalyptique où se succèdent luttes de pouvoir, trahisons, duel à l'épée, morts violentes, prophéties et suspense insoutenable (le domicile de Mrs Brisby qui s'enfoncent lentement dans la boue, noyant peu à peu sa famille).
Cette débauche visuelle ne serait bien sûr pas grand chose sans une narration solide et une histoire qui se tient. Si l'on met de côté les pitreries attachantes mais parfois hors-sujet de Jeremy, le corbeau maladroit et bavard, BRISBY & LE SECRET DE NIMH ne manque pas de cœur et de potentiel dramatique. Englobant le combat d'une veuve pour protéger les siens et l'exode planifié d'une colonie de rats dont l'intelligence est tout autant un don qu'une malédiction, le scénario, bien écrit et palpitant, a le mérite de ne pas prendre le public pour des idiots et de présenter un ensemble de personnages consistants. Mention spéciale à Jenner, fourbe politicien meurtrier, et à Dragon, chat teigneux aux instincts de prédateurs aiguisés et à mille lieux des félins maladroits dont les cartoons sont pourtant si friands. 



Victime d'une promotion quasi-inexistante et d'une distribution expéditive et mal pensée, le joyau de Don Bluth fut pourtant un échec cuisant qui faillit mettre un terme aux activités de Don Bluth et de ses complices Gary Goldman et John Pomeroy. Il faudra l'appui d'un certain Steven Spielberg pour qu'ils reviennent sur le devant de la scène quatre ans plus tard à l'occasion de FIEVEL ET LE NOUVEAU MONDE, une autre histoire de souris.

mercredi 27 avril 2011

LE SURVIVANT - 27 avril 2014

Carole refuse de quitter le camp, avec moi ou avec qui que ce soit d'autre. Je me suis donc résolu à attendre. A attendre et à faire ma part pour aider. Je ne sais pas si elle changera d'avis. Je commence à bien la connaître et je ne pense pas que ce sera jamais le cas. Sur ce pont, nous sommes très différent. Je suis capable de changer d'avis plusieurs fois par jour. Le résultat d'un cerveau qui ne se met jamais en veille, je suppose. Non pas que cela fasse de moi quelqu'un de très intelligent. Non. Je laisse le génie à d'autres. Mon truc à moi, c'est d'angoisser non stop, de repenser et de reconsidérer chacune de mes décisions passées, présentes et à venir. J'envisage en permanence les pires scénarios. Ce qui m'encourage à rester toujours prudent. Et, parfois, seulement parfois, à être un lâche. Lorsque cette lâcheté occasionnelle refait surface et tente de me faire plier sous le poids des remords, c'est là que je me souviens que je suis toujours en vie. A ce moment là, les remords ne servent plus à rien.

L'expédition pour récupérer le bétail a été reportée à demain. Thibault compte nous embarquer dans le camion, Carole, Jonathan et moi, mais pas sans une autre journée d'entraînement. Il nous a vu à l'œuvre et il sait que nous ne sommes plus des manchots avec une gâchette. Cependant ... mieux vaut en être certain. A cet effet, l'épreuve de ce matin nous a causé quelques belle frayeurs. Trois heures à l'extérieur du camp, trois chargeurs chacun, rester ensemble et en mouvement constant. Pour toute sécurité, le caporal Larivière assurait nos arrières depuis la tour de guet en qualité de sniper. Je suis fier de dire qu'il n'a pas eu à gâcher la moindre cartouche pour nous sauver la peau. Je suis toujours le moins doué des trois puisque, au contraire, de Carole et Jonathan, j'ai raté une de mes cibles, un cadavre un poil plus vif que la moyenne, à deux reprises. La première balle lui a arraché un doigt et la deuxième a perforé son sternum. Mais je n'ai pas paniqué. J'ai laissé venir, j'ai sorti mon couteau et je le lui ai planté dans le crâne aussi vivement que possible. Il s'est écrasé au sol aussitôt. Aucun de mes coéquipiers n'a eu à tirer pour me couvrir. Rapide et efficace. J'ai retenu ma leçon. Nous avons fait deux fois le tour du camp en décrivant le cercle le plus large possible. Ces salopards de zombies sont de plus en plus nombreux et ceux qui marchent ne sont pas les plus dangereux. C'est de ceux qui rampent qu'il faut se méfier à tout prix. Nous nous sommes fait surprendre une bonne dizaine de fois avant que l'un d'entre nous ne prennent le réflexe de garder le regard braqué vers le sol. 

Après un bref repas, nous avons continué à préparer notre petite ballade de demain tout l'après-midi. Vérification et nettoyage des armes. Test concluant des rampes artisanales (fabriquées par Morrison et Babacar) pour pouvoir embarquer le bétail dans les camions. On a rien laissé au hasard. La totale !
Au coucher du soleil, un imprévu est venu se rajouter au programme. Une épaisse colonne de fumée noire, parfaitement visible et distante de cinq ou six kilomètres, s'est élevée depuis le sud ouest. Orlando ? Possible. Quoi qu'il en soit, nous ferons un crochet pour aller vérifier. Ce n'est pas sur notre chemin mais en partant un peu plus tôt nous pourrons tenir notre emploi du temps.
Avant d'aller me coucher, j'ai fait un petit tour au bar des deux Christophe. J'y ai croisé Verney et son fan club au complet. Il a cru bon de me glisser un avertissement à l'oreille, un  petit conseil d'ami. "Vous vous débrouillez pas mal, mais dehors, comptez pas sur moi pour que je risque ma vie en te protégeant toi ou le charmant petit cul de ta copine. Compris ?" J'ai compris, dugland.

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #29 - CREEPSHOW

Réalisé par George A. Romero - Sortie US le 12 novembre 1982.
Scénario : Stephen King.
Musique : John Harrison.
Directeur de la photographie : Michael Gornick.
Avec Hal Holbrook (Henry Northrup), Adrienne Barbeau (Wilma Northrup), Leslie Nielsen (Richard Vickers), E.G. Marshall (Upson Pratt), Viveca Lindfors (Aunt Bedelia), Ed Harris (Hank Blaine), Ted Danson (Harry Wentworth), Stephen King (Jordy Verrill), ...
Durée : 120 mn.
Cinq contes horrifiques. 
Le patriarche autoritaire d'une famille d'aristocrates sort de sa tombe pour réclamer son gâteau de fête des pères ...
Un mari jaloux et psychopathe exerce une terrible vengeance sur sa femme et l'amant de celle-ci, ...
Un fermier simple d'esprit est contaminé par un parasite végétal échappé d'une météorite tombée dans son jardin, ...
Un professeur d'université frustré voit dans une créature vorace enfermé dans une caisse mystérieuse l'opportunité de se débarrasser de sa mégère de femme, ...
Un vieux milliardaire reclus dans son appartement et maniaque de la propreté développe une psychose des cafards, ...
Le film à sketch est un exercice délicat, rarement pratiqué au cinéma, américain ou non. Et pour cause. Les risques de se planter et de ne pas maintenir l'intérêt du public sur toute la durée (manque de cohérence, inégalité dans la qualité des histoires, rythmes narratifs trop variés) sont énormes. Né de l'association entre Stephen King et George A. Romero et hommage vibrant aux E.C. Comics (bandes dessinées horrifiques des années 50 er 60 compilant de courtes histoires aussi violentes que drôlement cruelles dans leurs dénouements), CREEPSHOW est probablement l'une des rares réussites incontestables du genre. 
Ecrivain aussi doué dans l'art du roman fleuve que de la nouvelle, Stephen King offre ici à George A. Romero un matériau de très haute volé. Tout en délivrant aux amoureux de péloches horrifiques ce qu'ils sont en droit d'attendre (morts-vivants revanchards en tous genres, monstre à la mâchoire béante et aux griffes acérées, virus extra-terrestre pas piqué des hannetons, insectes grouillants et mutilations diverses), King offre une vision extrêmement misanthrope de la race humaine en général et de la société américaine en particulier. Dépourvu du moindre héros, chaque histoire de CREEPSHOW s'amuse avec une férocité toute juvénile à tirer à boulets rouges sur tous les travers d'un monde obsédé par le fric, la réussite et le pouvoir. Jalousie, cruauté, lâcheté, bêtise, mensonge, culpabilité, j'en passe et des meilleures. Tous les personnages de CREEPSHOW, sans la moindre exception, exhibent une immoralité constante et grinçante et qui, pourtant, ne semble jamais bien loin de la vérité. Sous la (fausse) caricature, Stephen King ne cesse de surprendre par l'acuité avec laquelle il dépeint les comportements les moins admirables de ses contemporains. La capacité à faire et à répandre le mal n'épargne aucune classe sociale (du plus humble des paysans au multi-millionnaire en passant par les classes moyennes et la vieille bourgeoisie), pas plus qu'elle n'est le privilège des hommes (Adrienne Barbeau, notamment, campe un personnage de garce d'anthologie) ou des grandes personnes (dans un épilogue, un enfant se venge de son père de la plus horrible des façons, simplement par caprice). 
Une vision d'une telle noirceur ne passerait sans doute pas aussi bien sans le contrepoint idéal fourni par la réalisation énergique, colorée et respectueuse des codes du genre de George A. Romero. Habitué de la satire social et politique, le réalisateur de LA NUIT DES MORTS-VIVANTS et ZOMBIE n'adoucit en rien le propos nihiliste de son scénariste (c'est gore, c'est noir, c'est politiquement incorrect et ... c'est tant mieux !) mais il l'exprime sous une forme séduisante de grand cinéma populaire. Les histoires s'enchaînent sans répit via d'admirables transitions animées et la direction d'acteurs brillante laisse le soin à un casting impressionnant (dont Leslie Nielsen, vraiment inquiétant dans l'un de ses derniers rôles "sérieux" avant deux décennies de parodies) de cabotiner avec talent. CREEPSHOW ne laisse pas le temps au spectateur de réfléchir, l'invitant à profiter d'un grand huit macabre de très haute volée. 



Œuvre culte pour de nombreux cinéphile en manque de pellicules décomplexées, hargneuses et n'ayant pas d'autre prétention que l'envie de divertir et de faire frissonner, CREEPSHOW supporte admirablement le poids des ans, surtout en comparaison de ses deux suites carrément faiblardes. Quant aux très populaires CONTES DE LA CRYPTE, ils n'auraient sans doute jamais vus le jour sans l'impulsion offerte par le succès de CREEPSHOW. Il n'est pas tout à fait inutile de le rappeler ... 

mardi 26 avril 2011

LE SURVIVANT - 26 avril 2014

L'entraînement au tir a repris aujourd'hui. Pas comme si rien ne s'était passé, mais pas loin. Démontage des armes, nettoyage, remontage. Tir sur cible classique suivi d'un exercice en situation réelle. Carole a insisté pour prendre la place laissée vacante par Roman. Je ne m'y suis pas opposé, au contraire du sergent-chef Verney et des soldats Duroche, Péan et Burdeau. Ils ont protesté vivement, tentant d'enrober leur point de vue sexiste et archaïque derrière un "bon sens" qui ne tient pas debout.Thibault et le caporal Larivière ont eu le dernier mot, heureusement. Il faut en profiter, je ne pense pas que ce sera toujours le cas. 
Sans aller jusqu'à parler d'un don, Carole sait se servir d'une arme à feu comme peu de gens ici. Je continue de m'améliorer mais je n'aurais jamais ses aptitudes. 

Le repas de midi est sur le point de devenir une routine de plus en plus déprimante. Chaque petit groupe reste dans son coin. Personne ne se parle ou ne se regarde dans les yeux. J'ai préféré prendre mon assiette et je suis allé manger dehors, à l'ombre. Le bar est supposé rouvrir ce soir mais si c'est pour supporter la même ambiance, ce sera sans moins. Je ne m'attends pas à ce que tout le monde fasse la fête, non. Mais le malaise qui s'installe est plus profond que les décès de ces derniers jours. Il y a de la peur et il y a de la méfiance. 
J'ai passé le reste de la journée avec le docteur Denoy, pour l'aider. L'infirmière Gueydan s'est faîte porter pâle. L'infirmerie est vide, alors nous nous sommes contentés de ranger et de nettoyer. Il y avait encore quelques traces de sang sur le sol. Le sang de Mélanie. Je ne connais pas les origines de ce fameux test de psychiatre, le test de Rorschach. Je me trompe sûrement mais je me demande si ça n'a pas commencé par des taches de sang plutôt que par des tâches d'encre. Fixez une tâche de sang suffisamment longtemps et vous pourrez y voir tout ce que vous voudrez. Agenouillé, l'éponge à la main, j'ai fixé la plus grosse des tâches et j'y ai vu une tumeur. Un de mes oncles est mort d'une tumeur cérébrale il y a trois ans et la forme que j'ai vu sur le sol de l'infirmerie m'a fait penser à cette petite tâche sombre que j'ai observé sur les scanners à l'hôpital, quelques semaines avant le décès. 
Quand nous avons terminé le travail, Denoy m'a offert un verre de cognac. Réserve personnelle. Auto-médication. Puis nous avons discuté d'Orlando. Denoy l'a appelée par son prénom, Audrey. Il la connaissait mieux que quiconque. Elle lui a fait part de son désir de quitter le camp, avant même la fusillade. Elle était au courant pour le surnom dont je l'affublais Tissier et elle : les Enchaînés. ça ne l'a pas vraiment vexée, mais ça lui a fait prendre conscience qu'il y avait de la vérité là-dedans. C'est pour ça qu'elle voulait partir. Laisser Tissier pourrir dans son trou et fuir le plus loin possible. Vers le sud et vers la mer.

Vers le sud et vers la mer.

L'idée de vivre dans un camp, protégé par l'armée, m'a séduite, pendant un temps. Je crois toujours que je peux faire ma part pour aider la communauté.
Mais l'envie de partir, de reprendre la route, est revenue. Plus forte que jamais. 

Vers le sud et vers la mer.

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #28 - ROCKY III, L'OEIL DU TIGRE

Réalisé par Sylvester Stallone - Sortie US le 28 mai 1982.
Scénario : Sylvester Stallone.
Musique : Bill Conti.
Directeur de la photographie : Bill Buttler.
Avec Sylvester Stallone (Rocky Balboa), Talia Shire (Adrian Balboa), Mr. T (James "Clubber" Lang), Carl Weathers (Apollo Creed), Burt Young (Paulie), Burgess Meredith (Mickey), ...
Durée : 99 mn.

Champion incontesté depuis maintenant trois ans, Rocky Balboa est devenu le héros de toute une ville, Philadelphie qui fait ériger une statue à son image. C'est le moment que choisi James "Clubber" Lang, jeune boxeur agressif et puissant, pour venir le défier publiquement ...



1982, année faste pour Sylvester Stallone. ROCKY III a beau sortir sur les écrans quelques mois seulement avant RAMBO, il affiche des ambitions plus proches de la tournure que la carrière de l'acteur/réalisateur n'allait pas tarder à prendre. Après une séquelle pas vraiment déplaisante mais qui, à court d'idées, se contentait de "refaire" le match, offrant finalement à Rocky une victoire incontestable sur son adversaire Apollo Creed, la franchise prend un nouveau départ.
Seul aux commandes, Stallone transforme son "conte" sportif en pur film d'action. Et Rocky d'achever sa mutation pour devenir un pur héros mythologique. Tout y est. La mort du mentor, la défaite du héros, l'alliance avec l'ancien adversaire. Comme un écho à l'ultra-populaire STAR WARS, "l'œil du tigre", qualité intangible à la limite du mystique que doit reconquérir Rocky, fait référence à la Force qui alimente le pouvoir des fameux chevaliers Jedi. Quant aux fanfares triomphantes de Bill Conti, elles unissent leurs forces avec l'addictif hit rock FM scandé par le groupe Survivor, The Eye of The Tiger, symbole d'une époque à lui tout seul. 
Le réalisme social qui irriguait les deux précédents films, hérité de la décennie précédente, est toujours présent mais reste considérablement en retrait. ROCKY III délaisse les 70's et embrasse les 80's de toutes ses forces. Riche et matériellement comblé, incarnation parfaire de la réussite à l'américaine, Rocky Balboa ne se bat plus pour s'extirper de sa condition d'outsider pauvre. Il se bat pour prouver que sa réussite n'a pas été usurpée. Il se bat pour son image. Cette idée, Stallone l'a fait passer par une remise en question profonde de son alter-ego. Aveuglé par la gloire, Rocky a été faible. Il s'est laissé aller, oubliant ses origines et la valeur d'un dur labeur. "Méchant" charismatique et physiquement impressionnant, Clubber Lang (Mr. T, la révélation du film, et dont le regard de tueur est encore loin de la gentille brute de L'AGENCE TOUS RISQUES) est un miroir tendu à Balboa. De ce qu'il a été, des rêves qu'il a caressé et de la rage de vaincre qui a été la sienne. Or, pour vaincre Lang, Balboa se doit de laisser l'homme faillible attiré par une gloire facile qu'il est malheureusement devenu pour devenir la légende que tout le monde voit en lui, que les médias vantent tant. Le simple mortel doit se faire titan. Pour preuve, la stratégie du combat final consiste à encaisser des coups d'une puissance surréaliste pour épuiser Clubber Lang, Balboa cherchant ainsi à faire étalage d'une force et d'une endurance nouvelle et hautement fantaisiste.



Sans génie particulier mais avec une efficacité éprouvée, la mise en scène de Stallone ne cherche pas à offrir autre chose qu'un spectacle certes incroyablement naïf mais indéniablement galvanisant. Montage rythmé par les pluies de coups délivrées par les deux combattants, personnages bigger than life aux sentiments exacerbés, ROCKY III ne fait pas dans la dentelle et reste à ce jour une étape essentielle dans la carrière de Sylvester Stallone, point de départ de presque dix ans d'excès sur grand écran en tous genres (OVER THE TOP, COBRA, RAMBO II & III mais aussi ROCKY IV sont autant de descendants sous stéroïdes de cet OEIL DU TIGRE). Que l'on aime ou pas, quiconque cherchant à comprendre le "mythe" Stallone se doit de visionner ROCKY III, véritable instantané de l'état d'esprit et des ambitions de la star au début de la période Reagan.

lundi 25 avril 2011

LE SURVIVANT - 25 avril 2014

La tristesse, la colère, la frustration peuvent maintenant se lire sur tous les visages. A mes yeux, cela ne fait que confirmer ce que je savais déjà, ce dont j'ai déjà parlé. Cette enceinte ne nous protègera pas éternellement de la mort. Nous n'avons pas besoin des zombies pour mourir et pour souffrir. Bien avant qu'ils ne fassent leur apparition, nous avons toujours su faire preuve d'un grand savoir faire en la matière. Même si les dernières horreurs que nous avons vécu ont été commises de la main de Charles Louis Tissier, meurtrier psychopathe, pédophile, je n'oublie pas que c'est l'un des nôtres, un soldat chargé de notre protection qui l'a laissé sortir de sa cage. 
Le soldat Tomasi a laissé une lettre avec ses affaires, offrant une explication à ses actes. Tomasi était celui qui avait pris l'habitude de relever le lieutenant Orlando pour les brefs moments où elle devait se rendre aux toilettes ou lorsque qu'elle prenait une heure ou deux pour aller dormir (jamais plus). C'est pendant ces périodes que Tomasi et Tissier parlaient. C'est à partir de là que Tissier est entré dans la tête de Tomasi, ensemençant l'esprit influençable du jeune soldat d'idées aussi farfelues que dangereuses. Dans sa lettre, Tomasi parle de Tissier comme d'un prophète, l'homme qui lui aurait révélé la vraie nature du fléau qui ramène les morts à la vie. Cette "bonne parole", c'est pour que Tissier puisse la répandre dans tout le camp que Tomasi l'a libéré. Et quand on voit où ça l'a mené. Où ça nous a tous mené.
Selon moi, ce que Tissier voulait, c'était humilier le lieutenant Orlando une dernière fois, peut-être même la pousser au suicide. Et il a presque réussi. Orlando a quitté le camp et qui nous dit qu'elle n'est pas déjà morte, en se collant une balle dans la tête ou en se laissant dévorer par des zombies ? J'ai vu des gens faire ça, à Paris. Se laisser dévorer.
Les actes de Tomasi me font croire qu'il n'est ni le premier, ni le dernier à péter un câble dans ce camp. Je regarde tous ces visages et je me demande qui sera le prochain et quels dégâts il ou elle causera. Bordel ! Je me regarde dans une glace et je me demande si ce ne sera pas moi. J'ai une cette vision horrible où je passais de chambre en chambre en pleine nuit, poignardant tous le monde, sans faire de bruit. Levant puis abaissant le couteau. Levant puis abaissant le couteau. Encore et encore. Il m'a fallu des trésors de concentration pour la chasser de mon esprit. 

Carole n'a presque rien dit depuis hier. Elle se contente d'enchaîner clope sur clope. Si elle continue comme ça, il ne lui faudra pas longtemps pour être forcée de décrocher la cigarette. Il ne reste plus que 16 cartouches dans la réserve et ça diminue à vitesse grand V. Nous avons sauté le déjeuner tous les deux et nous sommes allés sur les tombes de nos amis. Nous nous sommes assis par terre et je l'ai prise dans mes bras. Parce que j'en avais besoin et elle aussi. Nous sommes restés comme ça longtemps. 

Les messes basses blâmant le capitaine Thibault pour ne pas avoir tiré une balle dans la nuque de Tissier dès le moment où celui-ci est entré dans le camp se poursuivent et prennent de l'ampleur. Le sergent-chef Verney, Christine mais aussi Frédéric sont les plus virulents. Le capitaine Thibault, lui, préfèrent les ignorer. Viendra le moment où il ne pourra plus faire semblant de ne pas entendre les critiques. 

J'ai croisé le docteur Denoy en allant changer mon pansement. Il pleurait. Je crois qu'il aimait vraiment le lieutenant Orlando et qu'il est mort de trouille à son sujet.

Je suis monté sur le chemin de ronde. J'ai vu un zombie qui n'avait même plus de mâchoire. Il faisait un bruit différent des gémissement de ses congénères. Avec un peu d'imagination, on aurait pu croire que lui aussi pleurait.

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #27 - POLTERGEIST

Réalisé par Tobe Hooper - Sortie US le 4 juin 1982.
Scénario : Steven Spielberg & Michael Grais & Mark Victor, d'après une histoire de Steven Spielberg.
Musique : Jerry Goldsmith.
Directeur de la photographie : Matthew F. Leonetti.
Avec Craig T. Nelson (Stuart Freeling), Jobeth Williams (Diane Freeling), Beatrice Straight (Dr. Lesh), Dominique Dunne (Dana Freeling), Oliver Robbins (Robbie Freeling), Heather O'Rourke (Carol Anne Freeling), Zelda Rubinstein (Tangina), ...
Durée : 114 mn.

Une famille vivant dans une banlieue résidentielle paisible est confrontée à d'étranges phénomènes qui se produisent dans plusieurs pièces de leur maison. La situation prend une tournure dramatique lorsque Carol Anne, leur plus jeune fille, est enlevée par une force inconnue en pleine nuit, durant un orage à la violence surnaturelle, et que la voix de l'enfant appelant à l'aide se fait entendre depuis un écran de télévision.


Gros succès en salle ayant généré deux séquelles décevantes et une série TV sans grand intérêt et sans liens réels avec le film, mais également transposition dans un cadre moderne du film de maison hantée classique (un pavillon dans une banlieue ensoleillée remplace la traditionnelle demeure gothique), POLTERGEIST est une drôle d'œuvre bicéphale, une moitié portant la signature de Steven Spielberg (producteur, scénariste mais aussi probablement co-réalisateur) et l'autre celle de Tobe Hooper, réalisateur de l'ultra-culte TEXAS CHAINSAW MASSACRE. 
Deux fortes personnalités donc, aux univers parfaitement identifiables et, à priori, incompatibles. Et à l'écran, il est amusant de pouvoir attribuer telle ou telle séquence à chacun des deux cinéastes. Pour autant, l'équilibre du film n'est jamais menacé par ces grands écarts réguliers entre un fantastique poétique et spectaculaire (signé Steven) et une horreur rentre dans-le-lard et volontiers malsaine à grand coups de cadavres suintants, de boue, de chairs arrachées à vif et de placards se transformant en bouche de l'enfer (merci Tobe !). Le scénario justifie même cette apparente schizophrénie par l'existence de deux types de spectres : les âmes de défunts cherchant à signaler leur présence se différenciant dans leurs apparitions de la force qui les contrôle, qui transforme leur haine en colère pour s'en nourrir, la "Bête". Formellement parlant donc, la cohésion de POLTERGEIST est miraculeuse, offrant à voir un film de fantômes particulièrement généreux. Le casting ne fait pas beaucoup d'étincelles mais le score dantesque de Jerry Goldsmith (entre thèmes aériens et moments de terreur tonitruants) et les effets spéciaux très réussis assurent le spectacle.
Sur le fond en revanche, Tobe Hooper, pas nécessairement un grand croyant en la bonté de l'espèce humaine, s'amuse à détourner un sujet spielbergien en diable (banlieue résidentielle américaine joyeuse, cellule familiale en crise, fantastique s'inscrivant dans le quotidien, etc ...) pour un faire quelque chose de nettement plus politique. En choisissant d'ouvrir son film sur l'hymne américain à plein volume mais que personne n'écoute, et qui, lorsqu'il s'achève enfin, semble être le signal qu'attendait les morts pour entrer en scène, on se demande d'abord où le cinéaste veut en venir. L'explication ne tarde pas. Hooper brocarde avec un grand sourire les valeurs dangereuses d'une Amérique entrée de plein pot dans l'ère du matérialisme reaganien. La télévision est transformée en portail par lequel les forces du mal s'introduisent dans un foyer et kidnappent les enfants, les jouets se transforment en objets meurtriers et les promoteurs sans scrupules profanent des sépultures pour construire des logements à destination d'ouvrier cherchant à fuir les villes. En retournant leur mode de vie contre des vivants qu'ils considèrent comme des intrus, des usurpateurs, les morts s'acharnent à reprendre possession de leur territoire. Le final, apocalyptique, durant lequel la maison des héros est broyée, concassée, et avalée par une lumière spectrale, et alors que les cercueils remontent à la surface tels des missiles, sonnent comme une victoire sans équivoque pour les fantômes. La famille Freeling, chassée de son domicile, terrifiée, n'a plus qu'à fuir la queue entre les jambes pour aller s'entasser dans la chambre anonyme d'un Holliday Inn, laissant sur le pallier, dans un dernier réflexe hilarant, un poste de télévision désormais clairement identifié comme un objet dangereux. Plus proche des fantômes que des vivants lorsqu'il s'agit de choisir son camp, Tobe Hooper se permet de mettre un grand coup de pied au cul de ces classes moyennes américaines arrogantes, satisfaites de leur réussite matérielle et de leur bonne morale.

 
Première grande production Spielberg, POLTERGEIST est un film fantastique atypique, moins grand public que sa réputation de film familial ne le suggère, oscillant entre ironie, terreur authentique et grand spectacle.

LE SURVIVANT - 24 avril 2014

Quatre personnes nous ont quitté aujourd'hui.

Charles Louis Tissier a tenté de s'évader aux premières lueurs de l'aube. Il est impossible de savoir exactement pourquoi mais il semblerait que le soldat qui était chargé de le surveiller, le 2ème classe Tomasi, ait ouvert la cellule du meurtrier et l'aurait ensuite libéré. La clé de la cellule a été retrouvé dans la serrure, ce qui indique qu'elle a été ouverte de l'extérieur, volontairement. En guise de remerciement, Tissier a abattu le soldat d'une balle en plein cœur. Ce premier coup de feu a suffi à réveiller tout le camp. Dans la confusion, nous sommes presque tous sortis de nos chambres, nous habillant à la va vite. C'est là que le deuxième coup de feu a retentit. 
Roman et Mélanie étaient encore à l'extérieur après la soirée au bar, profitant sans doute d'un moment de fraîcheur et d'intimité à l'ombre du bâtiment D. Tissier a croisé leur chemin. Il a tué Roman, tirant en visant la gorge. Puis il s'est emparé de Mélanie, la retenant en otage. Nous avons entendu les hurlements de Mélanie. Tissier n'a rien tenté pour la faire taire et ils les a même probablement encouragé. Il voulait un public. Il voulait attirer le maximum de personnes à l'extérieur des bâtiments. C'est l'attention des soldats qu'il a eu en premier. Ils l'ont mis en joue, lui ont demandé de jeter son arme. Mais pas assez vite. Ceux qui sont arrivés avant moi ont vu et m'ont tout raconté. Avec un sourire hideux et satisfait sur son visage de taré, il a exécuté Mélanie d'une balle dans le ventre. Puis, il a levé les bras en l'air, jetant son arme à bonne distance, faisant mine de se rendre. D'autres coups de feu, loin d'être les derniers, ont suivis. Trois soldats ont tirés, je crois, et ont tués Tissier sans autres formes de procès. 
Tout ce que moi j'ai vu, c'est le corps criblés de balles de Tissier sur le sol, dans une mare de sang. J'ai vu aussi des visages incrédules, fatigués, paralysés par le choc. Moi-même, il m'a fallu plusieurs minutes avant de croire à ce que je voyais, de comprendre. J'ai vu le lieutenant Orlando arriver sur les lieux du massacre et tomber à genoux, baissant la tête.
Mélanie était alors encore vivante, pleurant de douleur, se vidant de son sang. Elle a été emmenée à l'infirmerie. Elle y est morte trente minutes plus tard. Le docteur Denoy n'a rien pu faire. 
Il a ensuite fallu s'occuper des corps, empêcher la transformation. Le capitaine Thibault n'a pas perdu une seconde. Il s'est assuré de la mort de Roman, a dégainé le révolver qu'il tient en permanence à sa ceinture et a tiré une balle dans la tête du cadavre. Le deuxième sur sa liste a été Tissier. Une autre balle dans la tête. Mélanie a été laissée sous la responsabilité du docteur qui, lui, n'a pas utilisé d'armes à feu mais un clou et un marteau. Le soldat Tomasi a été retrouvé en dernier. Certains m'ont dit qu'il était déjà revenu à la vie, d'autres que non. Je n'ai pas été témoin de ça non plus. J'ai juste entendu la détonation. Encore une.

Trois tombes ont été creusées. Les corps de Roman, de Mélanie et du soldat Tomasi ont été enveloppés dans des sacs mortuaires. Le corps de Tissier a été brûlé derrière le bâtiment C selon les souhaits d'Orlando. Elle s'en est chargée toute seule. Thibault y a assisté. Nous, nous avons pu voir la fumée qui s'élevait dans le ciel. Une discussion animée a eu lieu entre le sergent-chef et le capitaine à ce sujet. Verney a insisté fermement pour que la dépouille de Tissier soit jetée à l'extérieur. Thibault a refusé sans compromis, laissant la décision à Orlando. "Si vous n'aviez pas tous les deux insisté pour garder Tissier en vie, au chaud et aux frais de la princesse, rien de tout ça ne serait arrivé ! Vos décisions ne valent pas un pet !" Verney l'a hurlé assez fort pour que d'autres l'entendent. Verney n'a peut-être pas tort, mais ce n'est pas le bon moment pour ça, pour lancer des polémiques. Nous devons rester unis. Mais, toute la journée, j'ai entendu des murmures, des discussions à voix basse qui désapprouvent le capitaine Thibault et Orlando. Christine, cette conne, m'a même reproché d'avoir laissé tomber mon idée de faire expulser Tissier du camp. Qu'elle aille se faire foutre ! Je n'ai rien à me reprocher.

Après l'enterrement en fin de journée, le lieutenant Orlando a tenu à faire ses adieux à tous le monde. Elle a demandé à quitter le camp et à reprendre la route. Elle se sent coupable de ce qui est arrivé. "Je sais ce que certains pensent de moi." a t-elle dit. Personne n'a essayé de la retenir. Pas même le docteur Denoy.
Elle est partie à la tombée de la nuit, un sac à dos rempli de provisions et une arme à la main. Les tireurs lui ont dégagé un chemin, puis elle a disparu. 

Quatre personnes nous ont quitté aujourd'hui. Et il ne reste plus que des cendres du monstre qui vivait parmi nous. 




samedi 23 avril 2011

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #26 - E.T., L'EXTRA-TERRESTRE

Réalisé par Steven Spielberg - Sortie US le 11 juin 1982 - Titre original : E.T., The Extra-Terrestrial.
Scénario : Melissa Mathison.
Musique : John Williams
Directeur de la photographie : Allen Daviau.
Avec Dee Wallace (Mary), Henry Thomas (Elliott), Peter Coyote ("Keys"), Robert McNaughton (Michael), Drew Barrymore (Gertie), ...
Durée : 115 mn.
Dans une banlieue résidentielle, Elliott, un garçon comme les autres, recueille un extra-terrestre malencontreusement abandonné par les siens au cours d'une mission d'exploration. Une amitié fusionnelle va se développer entre eux tandis que des silhouettes inquisitrices rôdent de plus en plus fréquemment autour de la maison d'Elliott, ...


Succès phénoménal et foudroyant, E.T. L'EXTRA-TERRESTRE installa le wonderboy Steven Spielberg en tête des réalisateurs les plus respectés et les plus influents d'Hollywood et ce, de manière permanente (son unique rival James Cameron a beau le battre en chiffres purs, il est bien loin d'avoir une filmographie aussi imposante, que ce soit en tant que metter en scène ou producteur). Avec ce conte de science-fiction, personnel et intimiste, sans aucune star à l'affiche, Steven Spielberg fit plus que confirmer ses aptitudes de conteur surdoué. Il livra un message dont la force et la simplicité (et non le simplisme) furent à même de toucher les spectateurs du monde entier, franchissant les barrières de langue et de culture.
Avec RENCONTRES DU TROISIEME TYPE et ARRÊTES-MOI SI TU PEUX, E.T. L'EXTRA-TERRESTRE est le film où Spielberg se livre le plus, nourrissant l'histoire de son propre vécu. Marqué en profondeur par le divorce de ses parents, le cinéaste y parle de son traumatisme de jeunesse à travers le regard d'un enfant ordinaire dont il épouse le point de vue rêveur et optimiste. Un peu comme les dessins animés mettant en scène TOM & JERRY, Spielberg se refuse, pendant la quasi totalité du métrage, à filmer les adultes dans leur totalité, les cadrant volontairement à la taille. Et si la mère d'Elliott n'a pas droit au même traitement que les autres adultes, le réalisateur insiste par notes subtiles sur le comportement infantile de cette dernière. Lors de la dernière demi-heure, alors que les enjeux et les émotions montent de plusieurs crans, Spielberg, même s'il nous montre enfin leurs visages, met en scène les adultes comme autant de menaces et d'êtres froids. En combinaison ou en costards cravates, ce sont des fonctionnaires dangereux car inaptes aux rêves et à la compassion, allant même jusqu'à menacer des enfants avec des armes à feu.
Par la force de sa mise en scène, Steven Spielberg força le public à aborder son histoire avec le point de vue et la capacité émotionnelle d'un enfant. L'émotion et l'instinct ne priment pas sur la réflexion mais la débarrasse du superflu tel que le cynisme ou la méfiance. Sauveur malgré lui, prophète apeuré doué du don de guérison, E.T., l'alien au physique improbable de troll difforme aux grands yeux, ne doit pas seulement sa crédibilité aux effets spéciaux qui l'animent mais aussi, et surtout, aux regards chargés d'émotions des enfants qui l'entourent. Ce message qu'il n'a pas besoin d'exprimer par des mots mais seulement par des gestes s'inscrit dans le cœur, la chair et l'esprit des jeunes générations et se transmet ainsi aux parents comme aux spectateurs.


Casting en état de grâce, environnement ultra-réaliste sublimé par des éclairages aux contrastes magnifiques, cadrages iconiques copiés et parodiés à l'infini et montage rythmé par les compositions virtuoses de John Williams (le dernier quart d'heure fut même remonté pour correspondre de plus près aux notes jouées par l'orchestre). E.T., L'EXTRA-TERRESTRE fait partie de ces quelques films pouvant être qualifiés de "parfaits". C'est une question d'équilibre, de dosage, mais aussi d'un certain "je ne sais quoi". La preuve, en tentant de le modifier à coup de retouches numériques maladroites pour son vingtième anniversaire, Spielberg rencontra l'animosité immédiate des cinéphiles et s'engagea aussitôt à ne pas faire disparaître la version originale sortie en salles en 1982. On l'a échappé belle !

LE SURVIVANT - 23 avril 2014

Je ne suis pas complètement ivre, mais c'est pas loin. Et je ne suis pas le seul. J'ai vu Alexis retourner dans sa chambre en titubant comme s'il était sur le pont d'un bateau en pleine tempête. Et la dernière fois que j'ai vu Carole, elle vomissait tout ce qu'elle savait en s'appuyant contre le blindé et avec Jamila qui lui tenait les cheveux en l'air. Beaucoup d'entre nous ont plus ou moins perdu l'habitude de boire et de faire la fête. Mais ça va vite nous revenir. Boire, pas faire la fête.
L'ouverture du bar des deux Christophe a été un joli succès. Le capitaine Thibault a porté un toast qui nous a tous fait chaud au cœur. Se relevant par groupe de trois ou quatre, tous les soldats sont venus boire un verre (et juste un verre). Stef et Anne-So se sont transformées en serveuses pour l'occasion et le lieutenant Orlando - clou de la soirée - s'est enfin autorisé un break pour trinquer au bar, laissant le soin au soldat Tomasi de monter la garde devant la cellule de Tissier. Il aura suffi d'un seul verre de téquila pour redonner un peu de couleur à ses joues pâles et creusées par la fatigue. 
En aidant à l'inventaire, j'avais remarqué une belle bouteille de rhum de Bélize. Après trois verres, je dois bien avouer que tous les espoirs que j'avais placé en elle ne le furent pas en vain.

Cette soirée a été le point d'orgue idéal à une journée que je qualifierai de foutrement satisfaisante ! 
Vous savez quoi ? Je ne suis pas un si mauvais tireur que ça. Je manquais simplement d'entraînement et de conseils. J'ai passé la plus grande partie de la journée sur le champ de tir, avec Jonathan, Roman et Mélanie. Notre formation est la responsabilité du caporal Larivière, un grand gaillard auquel il manque la moitié de l'oreille droite. Après avoir passé deux heures à démonter, à remonter et à apprendre tout ce qu"il y a à savoir sur les armes à feu, nous sommes passés à la pratique. A cause de mon épaule encore fragile, je suis le seul à ne pas voir tiré au fusil. Je me suis contenté d'une arme de poing, un Beretta 9 mm. Le plus important, m'a appris le caporal, c'est la respiration. En suivant son conseil, je me suis découvert des capacités de tireur que je ne me connaissais pas. Je n'ai pas mis au centre de la cible à tous les coups, mais les résultats sont encourageants. La dernière partie de l'entraînement a consisté à un exercice en situation réelle, sur cible mouvante. Autrement dit, sur des zombies. Avec l'appui de quatre tireurs et dans un périmètre dégagé, nous avons mis en pratique les leçons du caporal Larivière à l'extérieur. J'ai abattu quatre zombies avec un seul chargeur. Roman a remporté le jackpot avec un taux de réussite à 100 %. Nos chargeurs terminés nous sommes rentrés aux camps sans tarder. 

Je pense qu'à l'heure qu'il est, le bar doit être fermé. 

J'ai vu le docteur Denoy et le lieutenant Orlando en pleine discussion. Je jurerais avoir vu sourire la policère.

J'ai vu Verney tout seul dans son coin, rejetant la compagnie de l'infirmière Gueydan.

Dehors, sur le chemin de ronde, j'ai vu une paire de soldats perchés sur le parapet et lancés dans un concours pour savoir qui pisserait le plus loin. A moins qu'ils ne visaient des zombies ?

J'ai vu le petit Mohamed, assis dans le couloir des dortoirs, le regard perdu dans le vide. Je lui ai demandé pourquoi il n'était pas couché, mais il s'est efforcé de m'ignorer. 

Je pose ma plus belle plume maintenant ... et je vais fermer les yeux, même si j'ai la tête qui tourne.



LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #25 - THE THING

Réalisé par John Carpenter - Sortie US le 25 juin 1982.
Scénario : Bill Lancaster, d'après la nouvelle "Who Goes There ?"de John W. Campbell Jr.
Musique : Ennio Morricone.
Directeur de la photographie : Dean Cundey.
Avec Kurt Russell (R.J. MacReady), Wilford Brimley (Dr. Blair), T.K. Carter (Nauls), David Clennon (Palmer), Keith David (Childs), Richard Dysart (Dr. Copper), Charles Hallahan (Vance Norris), ...
Durée : 109 mn.

En plein milieu des étendues glacées de l'Antarctique, un groupe de scientifiques américains est confrontés à un organisme extra-terrestre extrêmement agressif qui assimile puis reproduit à l'identique les formes de vies qui l'entourent. Peu à peu, la paranoïa s'installe, ...


 

La perle noire de John Carpenter. Film d'horreur et de science-fiction au pessimisme incroyable, sérieux comme une feuille d'impôt, terrifiant et annonciateur d'une apocalypse inévitable, THE THING est un film sans le moindre compromis.   
Surfant sur le succès des indépendants HALLOWEEN et NEW YORK 1997, John Carpenter signa, avec THE THING, son premier film de studio. Dans la liberté la plus totale. Au box-office, face au message de paix et de tolérance porté par le E.T. de Steven Spielberg, il fut un échec total, ne gagnant ses galons de film culte qu'au fil des ans et des visionnages. Et il faut bien dire qu'en dehors de ses effets spéciaux de maquillage spectaculaires et novateurs (grâce à ce fou génial qu'est Rob Bottin), THE THING est film très très éloigné des modes de son époque. Rejetant le principe d'une ouverture pétaradante ou frénétique (passage presque obligé pour tous blockbuster fantastique qui se respecte depuis les prologues mémorables LES DENTS DE LA MER, STAR WARS et LES AVENTURIERS DE L'ARCHE PERDUE), d'un quelconque second degrés (en tout et pour tout, le film contient ne que deux répliques susceptibles d'arracher un sourire au spectateur) ou même d'un seul élément pouvant rendre le long-métrage séduisant ou calibré pour tel ou tel public (pas de jeunisme effréné, pas de personnages féminins, pas de thème musical à fredonner à la sortie de la salle), John Carpenter joue à fond la carte de l'austérité et de la crédibilité.
La mise en place de l'intrigue, redoutable, prend le temps qu'il faut. Aucun héros infaillible ne se distingue au sein du groupe. Des hommes ordinaires confrontés à une situation extraordinaire. Pour sa troisième participation avec John Carpenter, Kurt Russell compose un personnage de solitaire fatigué et désabusé, ne prenant les commandes qu'avec réticence, parce que les circonstances l'y ont forcé. Face au jeu tout en nuances et en colère rentrée de Kurt Russell, le charisme viril et le regard hypnotisant de Keith David (éternel second rôle hollywoodien alors qu'il aurait mérité bien plus souvent une place tout en haut de l'affiche) font merveille et explosent dans un dernier acte riches en confrontations; éprouvant pour les nerfs.
Le principe de la créature (n'importe qui peut abriter "la chose") est d'une simplicité et d'une efficacité absolue. La paranoïa la plus totale, renforcée par une multitude de fausses pistes disséminées avec sadisme, instille une peur bien réelle. Quant aux séquences de transformation, tableaux cauchemardesques où les chairs maltraitées prennent les formes les plus improbables, elles constituent autant de chocs pour le spectateur dont il est plus que difficile de sortir indemne. Citons comme exemple ce torse qui s'ouvrent pour révéler une mâchoire béante et baveuse en plein massage cardiaque. Effet garanti !


 Presque trente après et alors qu'un préquel saugrenu pointe le bout de son nez, THE THING ne vieillit toujours pas et ne vieillira sans doute jamais. Parce que peu de films fantastiques américains partagent un tel jusqu'au boutisme, une telle foi dans les mécanismes de la peur. Parce que John Carpenter a compris plus que n'importe quel autre que, pour plonger le public dans un effroi à la limite du supportable, il n'est pas nécessaire de lui sauter dessus un couteau à la main. Non. Il suffit de le prendre doucement à la gorge, puis de se mettre à serrer, petit à petit, de plus en plus fort. Sans jamais relâcher son étreinte. Ceux qui ont retenu la leçon ne sont pas légion .... 

vendredi 22 avril 2011

LE SURVIVANT - 22 avril 2014

J'ai de l'avance sur mon calendrier. Ce matin, l'infirmière Gueydan m'a retiré mon écharpe, puis elle m'a changé les bandages et les pansements. Je me sens comme neuf, ou presque. Avec une belle cicatrice. Blessure de guerre. L'épaule et le bras me font encore un peu mal, mais c'est supportable. Je vais VRAIMENT pouvoir me rendre utile maintenant.
L'entraînement au tir commence demain. Aujourd'hui, on peut dire que j'ai profité de mon dernier jour de "vacances". 

Partout dans le camp, la cohabitation, la vie en communauté au long terme, s'organise.Même si les militaires et les civils continuent de vivre séparés. Le mélange n'est pas encore à l'ordre du jour. Mais cette barrière finira par tomber, j'en suis certain. Et plus tôt que prévu.

L'aménagement du bâtiment D est presque terminé. Les derniers panneaux solaires sont en place. Nous avons Mr Morrison a remercier pour ça. Peu importe son français approximatif, l'homme a abattu un sacré boulot. Le générateur est parfaitement opérationnel. Il y a aura toujours des coupures d'électricité, comme il nous l'a précisé, mais elles seront moins nombreuses et moins longues. 
Tous les lits restants ont été installés et le nouveau dortoir est prêt à recevoir les treize soldats (qui dormaient un peu partout) dans de bonnes conditions. Thibault et Verney, eux, continueront d'occuper l'état-major. 
La bibliothèque a beau être artisanale, Frédéric la considère comme "temporairement" achevée. Son projet d'enclos à bétail, en collaboration avec Babacar sera terminé dans deux jours. Un espace dans les réserves a été aménagé pour le fourage, la nourriture des bestiaux, etc ...
C'est un tout autre projet qui concentre l'attention du camp pour le moment. Une petite surprise en fait. Les deux Christophe vont ouvrir un bar, oui monsieur. En utilisant ce qui aurait dû être un messe pour officiers, et avec l'accord (que dis-je ? la bénédiction !) du capitaine Thibault, ils ont récupéré toutes les réserves d'alcool pour mettre leur idée sur pied. Un lieu de détente pour tous. Que serait notre beau pays, notre civilisation sans un bar ? Cette idée, dois-je le préciser, est la bienvenue pour tous le monde. Les règles qui entoureront le bar des deux Christophe seront néanmoins très strictes et je n'y trouve rien à redire. Quatre heures d'ouverture par jour, pas une minute de plus. L'alcool sera rationné. Mais la socialisation sera encouragée. Pour ma part, j'entends bien devenir un client régulier. L'ouverture aura lieu demain.
La dernière innovation du bâtiment D concerne l'équipement radio et informatique. Nous allons continuer de lancer des bouteilles à la mer. D'autres camps militaires, d'autres refuges, proches ou éloignés, vont bien finir par nous entendre. Le poste sera tenu 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Les réseaux internet et téléphoniques, toutefois, restent silencieux, morts. Toujours aucunes nouvelles de l'extérieur. Verney est celui qui se montre le plus confiant quant à une amélioration. Confiant et impatient même. Il est convaincu que des renforts vont se manifester d'un jour à l'autre et qu'une contre-offensive va se mettre en place. Il continue de rêver d'une nouvelle guerre éclair, victorieuse, glorieuse. Je pense qu'il se trompe. J'ai quitté Paris depuis bientôt un mois. Ce camp a beau être porteur d'espoirs, je ne me leurre pas pour autant. Le monde tel que nous le connaissions n'existe plus. La guerre est terminée et nous l'avons perdu. Nous pouvons continuer à dresser des barrières entre nous et les zombies, nous ne parviendrons pas à ignorer leur présence et ce en raison d'un simple fait : ils sont en surnombre. Je me souviens d'une des dernières nouvelles diffusées à la télévision avant que le black out médiatique ne s'étende, une nouvelle affreuse se distinguant d'un millier d'autres. Un hôpital à Amiens n'avait pas pu être évacué à temps. Les morts-vivants s'étaient répandus dans le bâtiment à une vitesse stupéfiante. A deux ou trois exceptions près, personne n'en avait réchappé. Il y avait une trentaine de nouveaux-nés dans la maternité, abandonnés à leur sort. Vous voyez où je veux en venir ? Un échantillon de nouvelle génération balayé en quelques minutes. C'est un exemple, mais ce n'est pas un cas isolé. ça donne à réfléchir.


Carole s'est définitivement installée avec moi. Nous évitons les longues conversations. Nous ne nous comportons pas non plus comme des lapins ou des bonobos, mais nous profitons de la vie. S'endormir dans les bras l'un de l'autre est une sensation agréable, addictive même. Ce soir, elle m'a fait promettre une chose. Si elle venait à se faire mordre, elle veut que je lui mette une balle dans la tête sans attendre, que je ne la laisse pas aller au bout de la transformation. Parce que, elle, elle ferait la même chose pour moi.

J'ai promis.

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #24 - RAMBO

Réalisé par Ted Kotcheff - Sortie US le 22 octobre 1982 - Titre original : First Blood.
Scénario : Michael Kozoll & William Sackheim, et Sylvester Stallone, d'après le roman "First Blood" de David Morell.
Musique : Jerry Goldsmith.
Directeur de la photographie : Andrew Laszlo.
Avec Sylvester Stallone (John Rambo), Brian Dennehy (Teasle), Richard Crenna (Colonel Sam Trautman), Bill McKinney (Kern), Jack Starrett (Galt), ... 
Durée : 93 mn.






Lorsque l’on considère l’évolution du film d’action américain, RAMBO marque une étape capitale. Adaptation plus ou moins fidèle d’un roman signé David Morrell (moins de violence à l’écran et John Rambo survit à la fin, voilà pour les plus gros changements), le film de Ted Kotcheff, non content d’offrir à Sylvester Stallone un rôle mythique, prend le pari de transformer un sujet difficile, chargé en pathos et en tragédie (la réinsertion des vétérans du Vietnam dans un pays qui ne les aime pas), en un divertissement pétaradant ET intelligent. Par la grâce d’une mise en scène habile et d’un scénario rigoureusement pensé, RAMBO remporte ce pari haut la main.
Si le thème du traumatisme de la guerre du Vietnam irrigue tout le film, il est dilué pour éviter toute lourdeur psychologique. Et, surtout, John Rambo lui-même diffère considérablement de la représentation classique du vétéran. Rambo n’est pas un faible, un homme brisé ou un psychotique qui subit son traumatisme et les critiques sans réagir ou explose sans raison dans des accès de violence. Si son mutisme quasi-permanent et son regard souvent perdu sont les signes que la guerre et ses horreurs ont laissé leur empreinte sur lui (en plus des cicatrices sur son corps musclé de guerrier surentraîné), le personnage campé par Stallone n’a rien à voir avec le Travis Bickle que campait Robert de Niro dans TAXI DRIVER par exemple. Rambo est un héros qui se bat pour sa survie, son honneur et même la justice. Il se bat pour des causes validées par le public. Les maltraitances dont les hommes du shérif Teasle (Brian Dennehy) se rendent coupables à son égard en toute impunité et l’injustice de sa situation (on l’arrête juste pour son aspect, semblable à celui d’un hippie) l’identifient dès le début comme une victime (« Eux ont versé le premier sang, pas moi »). Puis, lorsqu’il refuse de subir plus longtemps ces outrages et s’enfuit spectaculairement (et sans faire de victimes), il devient dès lors un héros face à l’adversité. Un outsider qui va triompher des obstacles, retourner la situation à son avantage (de proie, il devient le chasseur, mais sans chercher à tuer pour autant) et survivre à la guerre que lui ont déclaré les autorités. L’émotion ne ressurgira, in extremis, qu’à la faveur d’un épilogue où le guerrier, après avoir mitraillé avec hargne et mis le feu à cette petite bourgade qui l’a rejeté, fondra en larmes. Saugrenue pour les cyniques, cette séquence s’inscrit pourtant dans une logique imparable. Personnage naïf, Rambo est en un sens un enfant (et le colonel Trautmann est comme un père pour lui) et il est en fait normal qu’il évacue son ressenti par des pleurs, émotion ô combien pure et sincère et qui finit de l’inscrire dans le registre héroïque (au premier degré) qui est le sien.
Stylistiquement parlant, RAMBO s’inscrit dans un classicisme plus que bienvenu. Cadres amples qui magnifient la nature et mettent les prouesses physiques en évidence et un rythme dicté par le montage sec et ponctué par les coups de feu autant que par le score de Jerry Goldsmith. Privilégiant des cuivres nobles pour le thème du héros, il accentue encore un peu plus l’aspect chevaleresque de la démarche du héros. Mais il sait aussi se faire trépidant avec ses boucles rythmiques géniales. 


 En mêlant drame, western, survival et film de guerre, RAMBO est un des manifestes de l’action des 80’s. Viril, héroïque et destructeur. Le guerrier solitaire, autrefois ambigu, peut désormais être aimé de tous et le vétéran du Vietnam n’est plus un perdant mais un héros positif, symbole des épreuves à surmonter pour remporter une victoire méritée et libératrice.