Luc et sa petite bande ne me font pas toujours pleinement confiance et je ne peux pas les en blâmer. Feriez-vous confiance à un parfait étranger venu sur vos terres avec un flingue caché dans le dos ? Probablement pas. Ils m'ont conduit dans leur "repaire" les yeux bandés. Arrivés à destination, ils m'ont retiré le bandeau et une jeune fille s'est occupé de ma blessure. Je me suis retenu de hurler lorsqu'elle a retiré la flèche de ma main. Puis elle l'a désinfecté avec un produit en forme de pâte épaisse, un truc gris qui pue presque autant qu'un mort-vivant. La demoiselle qui s'est occupé de moi s'appelle Marie. Âgée de 15 ans, elle est la grande sœur de Thierry. Alors qu'elle me soignait, je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer l'horrible cicatrice sur son abdomen. J'ai eu très envie de poser des questions mais Marie s'est empressée de me faire boire un breuvage qui m'a collé dans les vappes.
Je me suis réveillé alors que la matinée tirait à sa fin. Ma main ne me fait plus du tout mal. Les Sauvages (mais dois-je vraiment continuer à les appeler ainsi ?) vivent dans une caverne à flanc de montagne. A la lumière filtrant de l'extérieur, j'ai pu comprendre que cette caverne est orientée plein sud. L'endroit est assez grand et bien aménagé. La moitié des objets viennent de la récupération et le reste est fait main. Un étrange bric à brac. Luc est venu me chercher dès qu'il a su que j'étais debout et m'a demandé de le suivre à l'entrée de la caverne. Nous nous sommes assis sur un rocher, à l'ombre d'un arbre. Et j'ai obtenu les réponses à mes questions. Rien ne me force à croire Luc sur parole. Et pourtant, après les mensonges de son frère, je ne l'ai pas mis son histoire en doute une seule seconde.
Luc est le petit frère de Paul. Et le conflit qui les oppose ne se limite pas seulement à une divergence d'opinion. Paul a tué leur père. Cette partie-là est vraie. Mais le reste est un mensonge. Leur père n'a jamais été mordu par un zombie et ce n'est pas à Paul mais à Luc que les enfants avaient été confiés. Paul l'a tué par ressentiment. Sur le moment, Luc a laissé passé la prise de pouvoir de son grand-frère, allant même jusqu'à se convaincre de ses mensonges. Puis la faim est arrivée et des enfants sont morts. Dès lors, le divorce était consommé. Certains sont partis avec Luc, d'autres sont restés avec Paul. Si ce n'est que deux enfants de plus avaient ralliés Luc contrairement au nombre avancé par Paul. Deux enfants qui ne sont pas morts de faim, mais de la main de Paul. Pendus pour avoir osé quitter le gîte. Un petit message à destination des autres.
Depuis, Paul ne cherche plus à faire la paix avec Luc. Il veut le tuer. Mais il n'a pas envie de se salir les mains sur ce coup là. Il a tué son père mais il n'ose pas faire de même avec son petit frère. Un soupçon de morale ? Je ne pense pas. Disons plutôt un soupçon de lâcheté. Si c'est moi qui tue son frère, il n'aura pas à le justifier devant les autres enfants. Trop de mensonges, c'est de plus en plus dur à vendre à des gamins qui, aussi obéissant soient-ils, finissent toujours par retrouver l'envie de poser des questions qui fâchent. Pourquoi tuer soi-même quand un autre peut le faire pour vous ? Ainsi donc, Paul a jugé necessaire de tuer deux enfants pour me motiver dans ma mission. Deux victimes avec des coupables désignés et un instrument de vengeance idéal. Et le petit Thierry ? Luc m'a invité à fouiller la caverne mais il m'a assuré qu'il n'était pas ici. Et ça ne risque pas. Ce gamin est en fait l'ami le plus dévoué de Paul et partage sa haine pour Luc et son clan. C'est à Thierry, son propre frère, que Marie doit sa cicatrice. A l'heure qu'il est, il est probable que celui-ci se cache. Et je me demande même s'il n'est pas celui qui s'est débarrassé de la petite Jennifer en la pendant à un arbre. Le crime parfait en quelque sorte.
Il reste une dernière révélation. L'enfant que porte Rachel n'est pas celui de Paul. C'est celui de Luc. Et Luc ne coupera pas les liens avec son frère et sa petite communauté tant qu'il n'aura pas récupéré celle qu'il aime et qui est enceinte de son enfant.
Je n'ai pas tué Luc. Et, à l'heure qu'il est, Paul attend. Si je ne suis pas de retour demain, que va t-il penser ? Que j'ai échoué ? Que j'ai réussi et que je suis parti ? C'est à lui de jouer à présent.
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