vendredi 10 juin 2011

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #73 - ROBOCOP

Réalisé par Paul Verhoeven - Sortie US le 17 juillet 1987.
Scénario : Edward Neumeir & Michael Miner.
Musique : Basil Poledouris.
Directeur de la photographie : Jost Vacano.
Avec Paul Weller (Alex Murphy/Robocop), Nancy Allen (Officer Anne Lewis), Kurtwood Smith (Clarence Boddicker), Ronny Cox (OCP Vice President Richard "Dick" Jones), Miguel Ferrer (Robert "Bob" Morton), Dan O'Herlihy (The Old Man), Paul McCrane (Emil Antonowsky), ...
Durée : 103 mn.
Detroit, Michigan, dans un futur proche. La multinationale O.C.P. ambitionne de construire une cité moderne mais, pour cela, elle doit d'abord nettoyer la ville de sa criminalité record. Le programme "Robocop" est mis en place, ...


ROBOCOP marque une date importante dans l'histoire du cinéma américain de la décennie Reagan.  C'est avec ce mélange de satire, d'action et de science-fiction que le Hollandais Violent, Paul Verhoeven, fit une entrée fracassante à Hollywood. Produit par Orion Pictures pour capitaliser sur le succès encore vivace du TERMINATOR de James Cameron (y a des cyborgs dans les deux films, voilà pour le point commun ... Dieu bénisse les cols blancs des studios !), ROBOCOP évolue à la croisée de plusieurs genres et influences et échappe ainsi à toute tentative de classification. Cinéaste rentre-dans-le-lard mais érudit, Paul Verhoven, exilé de sa Hollande natale par les ligues bien pensantes suite à son ultra-punk SPETTERS, construit ce ROBOCOP autour du thème de la question de l'identité. 


Personne, et surtout pas le film lui-même, ne semble être ce que l'on croit. Le cyborg sans âme rêve et se souvient de sa vie passée. Le grand salaud du début; Clarence Boddicker (formidable Kurtwood Smith), n'est en fait qu'un larbin, le robot de combat mastoc ED-209 est sourd et couine comme un bébé quand il rate une marche, les gardiens de la paix se mettent en grève comme de simples fonctionnaires et les pires nouvelles sont annoncées au JT avec un grand sourire. Avec un aplomb et un savoir-faire incroyable, Verhoeven enchaîne les ruptures de ton. De la science-fiction au polar, du polar à la comédie, de l'action à la tragédie et ainsi de suite. La photographie réaliste de Jost Vacano (un des fidèles de Verhoeven depuis ses débuts), le score très premier degrés de Basil Poledouris et une direction artistique simple mais fonctionnelle assurent à l'ensemble une cohérence de tous les instants. La vision de l'Amérique ainsi donnée est on ne peut plus édifiante. Victime de ses propres excès, vampirisé par l'ultra-médiatisation, le consumérisme et le mondialisme précipité, les Etats-Unis ressemblent à un vaste zapping télévisé totalement inhumain. Une masse informe sans identité propre. Tout et son contraire.


La métaphore la plus intéressante lorsque l'on aborde ROBOCOP est clairement christique. Verhoeven, ce n'est un secret pour personne, est fascinée par la vie du Christ et ce qu'elle symbolise. Alex Murphy, simple policier "ressuscité" en sauveur d'acier obéissant à des commandements lapidaires et une morale stricte est un Christ moderne, cela ne fait aucun doute. Si ce n'est que Dieu prend ici la forme d'une gigantesque corporation dénuée de morale. Le prolétaire enfermé dans son armure doit donc se rebeller et regagner son identité. Il doit s'affranchir. Mais, lucide, Verhoeven pose de nombreux freins à cette révolte. Robocop a beau redevenir Murphy (le sauveur redevient homme), se libérant ainsi des directives de ses patrons, il n'en reste pas moins prisonnier de la loi et de l'image de justicier que son fils rêvait de le voir endosser. Le libre-arbitre n'est qu'une illusion. La comédie ne fait plus rire et la tragédie devient grotesque. 


Ce qui fascine Paul Verhoeven, ça ne semble pas être l'objectif à atteindre (redevenir soi-même pour Murphy, garantir son indépendance à Hollywood pour le cinéaste) mais bien les méthodes pour y parvenir. ROBOCOP est l'un des films de sale gosse les plus fascinants qu'il nous ait jamais été donné de voir puisque c'est précisément au moment où on s'attend à ce qu'il nous tende un bon gros majeur qu'il redevient sage. Et vice versa. Insaisissable, je vous dis !

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