dimanche 5 juin 2011

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #66 - LE SIXIEME SENS

Réalisé par Michael Mann - Sortie US le 15 août 1986 - Titre original : Manhunter.
Scénario : Michael Mann, d'après le roman "Red Dragon" de Thomas Harris.
Musique : Michael Rubini, The Reds.
Directeur de la photographie : Dante Spinotti.
Avec William Petersen (Will Graham), Dennis Farina (Jack Crawford), Brian Cox (Dr. Hannibal Lecktor), Kim Greist (Molly), Joan Allen (Reba McLane), Stephen Lang (Freddy Lounds), Tom Noonan (Francis Dollarhyde "The Tooth Fairy"), ...
Durée : 120 mn.
Spécialisé dans la chasse aux tueurs en série, l'agent du FBI Will Graham jouit d'une retraite prématurée au bord de l'océan avec sa femme et son fils. C'est alors que son ami et collègue Jack Crawford lui propose de reprendre du service pour attraper un assassin que l'on surnomme "Tooth Fairy", ...


Le film de serial killer peut-être considéré comme un genre à part dans le paysage hollywoodien et MANHUNTER est l'une de ses œuvres séminales. Outre le fait qu'il est le premier long-métrage à faire apparaître le personnage culte du tueur cannibale Hannibal Lecter (ici rebaptisé Lecktor, vous apprécierez la nuance, et interprété par le génial Brian Cox), son équilibre si particulier entre réalisme procédurier et psychologique et son extrême stylisation visuelle est une source d'inspiration qui, 25 ans plus tard, continue d'influencer le genre à la télévision comme au cinéma. 


Très attaché à la crédibilité des histoires qu'il raconte, le cinéaste et scénariste Michael Mann s'attache, dans la première moitié de son film, à décrire avec précision au spectateur le fonctionnement du FBI dans la traque des tueurs en série en s'attardant tout particulièrement vers un type de personnage alors peu connu : les profileurs. Mann dresse le portrait d'un homme qui, pour arrêter les meurtriers, se glisse au plus profond de leur psyché. Dangereux pour la santé mentale, ce processus d'identification est traduit à l'écran par la performance borderline de William Petersen et les cadrages très étudiés du cinéaste. Le malaise palpable émanant de ces scènes où le personnage principal inspecte les lieux du crime en "rejouant" dans son esprit les meurtres et en s'adressant à voix haute au tueur (bien sûr absent) relève de l'inédit. Sous nos yeux, le masque de la normalité du héros se fissure peu à peu, laissant transparaître la haine et la violence que ce dernier tente tant bien que mal de dissimuler. 


La seconde moitié de MANHUNTER, toujours plus audacieuse, propose l'inverse en basculant de l'autre côté du miroir et en se concentrant sur le meurtrier psychopathe incarné par Tom Noonan. Derrière l'image mystérieuse et iconique du monstre insaisissable se cache un être pathétique. Défiguré par un bec de lièvre, timide et jaloux, rêvant de puissance et frustré, Francis Dollarhyde est avant tout un homme amoureux d'une belle aveugle, incapable de déceler la nature véritable de son soupirant. Pour le spectateur, habitué à craindre et à haïr le "méchant", cette histoire d'amour inattendue, touchante et tragique vient bousculer les stéréotypes et créé un parallèle novateur entre le chasseur (Will Graham) et sa proie (Francis Dollarhyde) jusqu'à un affrontement final spectaculaire et opératique.


Le principe est aujourd'hui galvaudé. Mais il reste utile de savoir qu'à la sortie de MANHUNTER, il s'agissait là d'une grande nouveauté et que, sans le film de Michael Mann, des séries aussi populaires que LES EXPERTS (avec William Petersen d'ailleurs) ou CRIMINAL MINDS et des films comme LE COLLECTIONNEUR, BONE COLLECTOR et même SE7EN (un héritier "indirecr") lui doivent d'avoir défriché le terrain. MANHUNTER fut un échec à sa sortie mais sa réhabilitation, au cours des années, n'est que justice.

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