D’abord, les ténèbres.
Puis un cri, un long cri de douleur. La pluie qui s’abat en un déluge assourdissant et, au loin, de grandes vagues qui se fracassent sur des remparts sombres et élevés.
Un homme est étendu, nu, sur la pierre froide et humide. Au dessus de sa tête, la tempête fait rage. Il se relève et s’aperçoit qu’il est sur une grande place face à un temple antique, entouré de colonnes gigantesques qui semblent défier la colère du ciel.
D’autres cris, au loin.
Il a peur et il a froid et il se dit que tout ça n’est qu’un rêve, un mauvais rêve. Forcément, ce rêve, ce cauchemar va se terminer. Bientôt. D'un moment à l'autre.
Pourquoi le cauchemar ne se termine pas ?
Il s’avance vers le temple. Peut-être y trouvera t-il une réponse, le salut ou une sortie à ce cauchemar bien trop réel. Il n’a pas fait trois pas que des silhouettes s’approchent de lui, l’encerclant peu à peu. Ces créatures ne sont pas humaines. Elles semblent faîtes de boue, mais ce n’est pas tout à fait le cas. Il s’agit d’une pâte épaisse et nauséabonde et noire, faîte à partir de la peau, des muscles, des tendons et des organes des morts. Au milieu de leurs têtes malformées se trouve un seul œil, jaune, empli d’un désir malsain. L’homme voit s’évanouir tout espoir de fuite et ne peut qu’attendre la fin. Sa fin. Les créatures plongent ce qui leur sert de main dans leur propre panse et en ressortent chacun un poignard taillé dans l’os.
Le cercle se referme et les créatures poignardent l’homme en de multiples endroits. Les plaies sont béantes et la douleur effroyable mais pas une goutte de sang ne s’échappe des blessures. Au bout d’un instant, les créatures cessent de frapper le corps de l’homme et reculent de plusieurs pas. L’homme constate que ses plaies s’ouvrent et se referment comme des bouches de bébés affamés réclamant leur pitance. Un grand tremblement fait gémir la pierre et une bourrasque soudaine souffle les créatures, les réduisant à une tornade de cendres. De plus en plus vite, les cendres tourbillonnent autour de l’homme, formant un épais nuage. Toujours plus grandes, les plaies finissent par aspirer le nuage de cendres et l’homme sent cette poussière assécher son sang pour le remplacer dans ses veines. Son corps brûle d’une fièvre ignoble et il ne peut que se tortiller, hurlant de douleur sur le sol de pierre. Du coin de l’œil, il voit d’autres nuages de cendres, d’autres hommes et femmes se faire poignarder. Il compte six autres suppliciés. Et le rite se répète. Et d’autres cris se font entendre.
C’est à ce moment précis que la pierre sous son corps finit par céder. Il tombe dans un abîme sans fin, exposé au regard de monstres anciens et nombreux. Il tombe.
Il tombe et finit par se réveiller.
Il se relève dans son lit et ne prend que quelques secondes pour réaliser qu’il ne s’agissait que d’un cauchemar. Dehors, il ne pleut pas et sa femme est à ses côtés, grognant d'avoir ainsi été dérangé dans son sommeil puis se rendormant presque aussitôt.
Mais ce n’était pas un simple cauchemar.
Et le passé n’a pas révélé tous ses secrets.
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