mercredi 30 mars 2011

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #3 - THE BLUES BROTHERS

Mettons fin au suspense : THE BLUES BROTHER est le meilleur film de tous les temps. Voilà, c’est dit. Pas la peine de revenir dessus. Passons à autre chose. En transposant sur grand écran l’univers musical ultra-référentiel du duo Aykroyd/Belushi (qui interprétait les frères Blues pour le public du Saturday Night Live depuis 1976), John Landis s’est retrouvé face à un défi de taille : comment éviter de trop diluer sur la longueur d’un long-métrage ce qui n’était à l’origine que de courtes et énergiques prestations scéniques ? Pour résoudre ce casse-tête, Landis, alors au zénith de sa créativité, a choisi la méthode la plus frontale : livrer un grand spectacle frénétique et destructeur se reposant sur un scénario prétexte, tout en livrant son message d’amour, de paix, de rock n’ roll et de désobéissance généralisée avec un sérieux imperturbable et une sincérité en bêton.
S’il reste conçu et pensé pour le cinéma (Landis exploite son imposant budget avec une belle générosité), THE BLUES BROTHERS ne renie en rien ses origines télévisuelles puisque, en soi, le film n’est ni plus ni moins qu’une enfilade de sketch reliés entre eux par un argument simplissime (sauver un orphelinat déficitaire en organisant un gigantesque concert de blues), une justification aussi absurde que géniale (les Blues Brothers sont en mission pour le Seigneur !)  et une enfilade d’antagonistes/running gags carrément irrésistibles (un duo de troopers hargneux, des nazis, un groupe de country ou encore Carrie Fisher et son arsenal à faire pâlir Rambo de jalousie). Le tout ponctué de numéros musicaux soignés et rythmés, destinés à remettre sur le devant de la scène un all-star cast alors en passe de virer has been (Ray Charles, Aretha Franklyn, James Brown, Cab Calloway, John Lee Hooker). Pour éviter la lassitude que pourrait engendrer un tel procédé, John Landis construit son film en un crescendo totalement maîtrisé, jusqu’à une dernière demi-heure proprement euphorisante où il fait suivre au fameux concert une homérique course-poursuite qui, en plus de pulvériser des records en matière de tôle froissée, de vitesse et de figuration policière, se permet également de résoudre la totalité des sous-intrigues cumulées et … de faire décoller les voitures au son de la Chevauchée des Walkyries.
La complémentarité et la force comique de Dan Aykroyd (alors svelte) et de John Belushi (capable de jongler comme personne entre statisme et bouffonnerie) est, quant à elle, la pierre angulaire du film. Animés par une passion commune et sans borne pour la musique noire américaine, les duettistes saisissent l’opportunité du long-métrage pour dresser le portrait, parfois inattendu (et pas si éloigné que ça du Philadelphie du ROCKY de John G. Avildsen), du Chicago des sans grades, entre pauvreté chronique et optimisme sans limite. Ainsi, les Blues Brothers ont beau être menteurs, voleurs, et irrespectueux de la loi et de l’ordre, ils se battent pour une cause juste. Frères blancs délaissés par leur parents, ils se sont construit une identité métissée dans un orphelinat religieux et se veulent (peut-être un peu malgré eux) les champions de la lutte des classes comme en témoigne l’impayable scène du restaurant où ils se font un plaisir de gâcher une soirée de la haute société afin de débaucher un de leur ancien musicos devenu serveur propre sur lui. Et quand ces dernier prêchent l’amour (même à une bande de rednecks avides de country music et de bières) ils visent des valeurs essentielles tels que la tolérance et la liberté. Révolutionnaire, les Blues Brothers ? Un peu, mon neveu. Sans eux, il y a fort à parier que les films des Adam Sandler, Ben Stiller, Mike Myers et autres Will Ferrell ne seraient pas les mêmes. Ils sont les pères de la nouvelle comédie américaine, ce mélange de régression et de naïveté, le tout animé de vrais ambitions d’auteurs. Et en plus, c’est le meilleur film de tous les temps. Mais je l’ai peut-être déjà dit, non ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire