mardi 29 mars 2011

LE CINEMA AMERICAIN DES ANNEES 80 #2 - RAGING BULL

L'anti-Rocky Balboa !! Scorsese et De Niro, en forme olympique, imposent à l'Amérique la vision d'un looser d'envergure. Boxeur talentueux, Jake La Motta est l'exemple type du gars qui va tout foutre en l'air. Sa vie, sa carrière, sa famille. Pourquoi ? Par jalousie, par paranoïa, par insatisfaction. Non, Jake La Motta n'est pas Rocky Balboa et ses victoires sur le ring n'ont rien à voir avec une quelconque rage de vaincre ou de se prouver quoi que ce soit. Jake La Motta est un animal qui ne saura jamais vraiment ce qu'il cherche.
RAGING BULL est né de la passion de Robert De Niro pour un livre narrant la vie de Jake La Motta, boxeur à l'envergure de champion originaire de Brooklyn. Et il mit toute son énergie à convaincre Scorsese de le réaliser. En proie à un doute alors constant, le réalisateur de MEAN STREETS et TAXI DRIVER eut toutes les peines du monde à trouver de l'intérêt à cette histoire. A peine croyable lorsque l'on voit le résultat, véritable concentré des thèmes de prédilection du bonhomme. Auto-destruction, tentatives désespérées de rédemption, déchéance, croyance et symbolique catholique. Tout y est ! Véritable ordure à laquelle le public est quasiment contraint de s'attacher, Jake La Motta est un personnage fascinant. En constante descente aux enfer, le personnage relance l'intérêt chaque fois un peu plus de par son caractère imprévisible.
Stylisée à l'extrême (les combats de boxe sont des morceaux de bravoure technique tous indépendants les uns des autres), la violence semble ici être le seul moyen d'expression du personnage principal. Et ,par contamination, de tous ceux qui l'entourent. Jake La Motta est incapable de s'exprimer autrement que par ses poings, ainsi l'atteste ses pathétiques tentatives de stand up comedian dans différents cabarets. 
L'utilisation du noir en blanc, forcément anti-commerciale, enferme le film dans une univers à la fois désuet et sans avenir mais renforce également la notion de parabole intemporelle de RAGING BULL. S'il s'abstient de porter des jugements, Scorsese épingle la futilité de la quête de la gloire et du bonheur matériel. Une quête dénuée de la moindre spiritualité et qui amène son "héros" dans une impasse déchirante et douloureuse. Cloîtré dans une cellule, il ne cesse de frapper un mur comme une bête en cage, criant "Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?" encore et encore. Il n'obtiendra jamais de réponse et, dans un ultime éclair de lucidité, comprendra que "le spectacle doit continuer". Quoi qu'il en coûte ...
La forme est brillante, le discours est nihiliste au possible (pas de héros, pas d'échappatoires), mais RAGING BULL reste, trois décennies plus tard, un objet aussi déroutant que profondément attachant.  

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